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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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26 juin 1842

26 juin [1842], dimanche matin, 9 h. ¼

Bonjour mon cher petit bien-aimé, bonjour mon adoré petit homme. Je ne suis pourtant pas contente de vous, mon pauvre petit manchot, car vous ne venez pas plus déjeuner avec moi que rien du tout malgré toutes les belles promesses que vous me faites tous les jours. Je suppose que Zoé [1] n’est pas étrangère à cet empêchement et je suis décidée à agir en conséquence. Vous n’avez qu’à vous bien tenir, mon cher petit scélérat, je ne vous dis que ça. Comment va notre petit garçon [2] ? Comment avez-vous passé la nuit tous les deux, mes chers petits amis ? Si ça pouvait être bien, je serai BIEN HEUREUSE car ma joie, ma santé et mon bonheur sont en vous, mes chers petits hommes ravissants. Je t’aime mon Victor bien-aimé, je t’aime, je t’aime, je t’aime, je t’aime. Mes deux monstres font joliment bien sur ma cheminée, on dirait qu’ils ont été faits exprès pour elle. Quand je pense avec quelle grâce et quel empressement tu me les as donnés, mon cher bien-aimé, je les trouve encore plus charmants et je les en aime davantage. Je ne dis pas que je t’en aime davantage parce que depuis le premier jour de notre amour le plus est impossible, mais tout ce que tu fais de bon et de doux, je le sens dans mon cœur avec des transports de reconnaissance et d’adoration à faire envie au bon Dieu. Quand te verrai-je, mon toto chéri ? J’ai bien besoin de savoir comment va le petit garçon, comment va ta pauvre petite patte blanche et j’ai bien besoin de te caresser et de te baiser à bouche que veux-tu ? Tâche de venir tout à l’heure, ce sera d’ailleurs le bon moment et je ne serai pas fâchée d’avoir ton avis sur l’excellence de la mécanique et la perfection du corset, vous en jugerez d’après nature. Dépêchez-vous si vous voulez jouir du coup d’œil.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16349, f. 181-182
Transcription d’Ophélie Marien assistée de Florence Naugrette


26 juin [1842], dimanche après-midi, 2 h.

Dépêchez-vous de venir, mon cher amour, jouir du coup d’œil du fameux costume de chaleur que je mets malgré la pluie et le vent pour faire plaisir à Claire et aussi, et surtout, pour vous plaire. Vous avez bien perdu de n’être pas venu tout à l’heure pour le grand acte du corset, mais comme il y a quelque chose à rectifier, vous pourrez dans deux jours avoir la première représentation de cet important élément dont la cérémonie d’aujourd’hui n’est qu’une répétition générale.
Mon Dieu que je suis bête quand je suis SPIRITUELLE, c’est à me donner des grands coups de pieds sur mes [clunes [3]  ?] les plus [clunes  ?]. Vraiment il n’est pas permis d’être aussi stupide que je le suis. Je commence à croire que ce pourrait bien être moi qui vous aie vendu les Feuilles d’automne trois cent francs dont vous avez fait trois cent mille francs sans remords comme un brigand que vous êtes. J’en ai bien du regret à présent, une autre fois vous ne m’y reprendrez pas, vous pouvez y compter. En attendant ne me faites pas attendre pour savoir comment vous avez passé la nuit, comment va le petit garçon et comment fonctionne votre pauvre petite patte que je baise et que j’adore de toute mon âme. Baisez-moi mon cher petit homme et venez bien bien vite. Je suis très pressée de vous voir. Je suis en train de gagner mes monstres, je travaille à force à votre tapisserie, je voudrais l’avoir fait pour votre fête. Oui, mon pauvre ange adoré, je veux que vous ayez quelque chose de moi dans votre petit[e] chambre pour ce jour-là. Mais il faut que je me dépêche. Je vous aime mon amour.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16349, f. 183-184
Transcription d’Ophélie Marien assistée de Florence Naugrette

Notes

[1À identifier.

[2François-Victor, fils de Victor Hugo, se remet d’une maladie.

[3Juliette emploie ce mot à cette époque, sans qu’on parvienne à l’élucider.

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