Guernesey, 16 oct[obre] [18]72, mercredi 6 h. ¾ du m.
Je suis toute confuse et toute triste, mon cher adoré, de m’être laissée devancer par toi au rendez-vous de la serviette ; cela est d’autant plus bête que je ne dormais pas. Une autre fois je ne m’attarderai plus aux bagatelles de la porte mais je courraia au contraire droit à la fenêtre d’où on peut te voir sans souci du pionçage prolongé de mes femmes [1]. Ton patron-minette me fait espérer que tu as passé une bonne nuit, je verrai bien tantôt s’il dit vrai. Pendant que j’attendais bêtement l’heure d’ouvrir ma porte, j’ai lu l’admirable article de ton fils [2] ; et comme il a superbement raison [3], ce [illis.] profond ministre ! Quel dommage qu’il ne veuille pas signer de Guernesey tout ou partie de ces éloquents articles. J’espère que par la force, non des choses, mais de son cœur, il y viendra en bonne compagnie de Petit Georges, de Petite Jeanne et de leur maman. En attendant ce jour béni, souhaitons-leur à tous ces ingrats inconscients, la santé le succès et le bonheur assez pour qu’ils ne souffrent pas et trop peu pour qu’ils ne sentent pas le besoin de venir être heureux ici auprès de toi. Je dis mal mais je sens bien et que je donnerais tout ce que tu me permettras de donner pour que tu sois en pleine possession de ta famille et de ton bonheur. Je t’adore.
BnF, Mss, NAF 16393, f. 287
Transcription de Bulle Prévost assistée de Florence Naugrette
a) « courrerai ».