Paris, 5 juin [18]74, vendredi matin
Personne n’a pu me dire si tu as passé une bonne nuit, si tu es encore chez toi ou déjà sorti. Ce que je sais, c’est que ton Petit Georges a très bien dormi et qu’il va de mieux en mieux. Cette bonne nouvelle me fait attendre sans trop d’impatience le moment où je te reverrai. Jusque-là, je tâche de remonter sur ma bête qui regimbea sous les fouailleries trop prolongées d’une beaucoup trop longue vie. Heureusement que tu as de nombreux et jeunes relais qui te conduirontb partout où tu voudras aller et ailleurs. Je suis donc très tranquille de ce côté-là. Je le suis peut-être un peu moins sur la facilité avec laquelle tu introduis chez toi, dans le for intérieur de ta pensée et de ton travail, sous prétexte de famerie, un tas de gens fort honnêtes, je n’en doute pas, mais peut-être aussi fort indiscretsc et d’un enthousiasme dont les scrupules te sont inconnus. Je tremble que tu t’en aperçoivesd quand il ne sera plus temps. C’est pourquoi j’appelle ton attention là-dessus parce que je suis aussi jalouse de ton génie que de ton amour, de ton œuvre que de ton corps, parce que je t’adore sous toutes les espèces [1].
BnF, Mss, NAF 16395, f. 100
Transcription de Véronique Heute assistée de Florence Naugrette
a) « rejimbe ».
b) « conduirons ».
c) « indiscret ».
d) « aperçoive ».