Paris, 24 mars 1881, jeudi
Je vais te porter ma restitus, mon grand bien-aimé, empêchée jusqu’ici par un tas de rangements de papiers et de journaux à faire frémir. Je viens seulement de finir le classement des factures et je m’aperçois que depuis un an et plus nous n’avons pas payé l’horloger dont le total se monte à 177 F. ainsi que tu pourras t’en assurer par le détail des réparations faites aux pendules de la maison et à ta montre y compris l’abonnement, non payé, du remontage pendant deux ans et qui se monte pour les deux ans à 100 F. Je t’y fais penser parce qu’il viendra très probablement dans cinq ou six jours et qu’il faudra liquider cet arriéré.
Je te fais penser aussi que tu as séance publique aujourd’hui au Sénat à deux heures.
Il fait très beau et un peu froid mais en voiture close cela importe peu. Ce qui importe, ce qui m’importe, à moi, c’est que tu m’aimes comme je t’aime, sans solution de continuité. Quant à t’aimer, je t’adore et tu ne le sais que trop, hélas ! Mais tant pis pour toi, c’est ton affaire. Maintenant embrassez-moi, grand-père !! Je vais aller moi-même chercher ce baiser en échange du mien.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16402, f. 60-61
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette