Paris, 2 mai 1882, mardi matin, 8 h.
Quel bonheur, mon cher adoré, je commence ma journée par toi qui es le commencement et la fin de toutes choses pour moi. Il fait un temps exquis ce matin et peut-être frais. Tu [ferais] bien d’en profiter pour te lever afin d’en jouir et aussi pour rompre avec les habitudes semia paresseuses de l’hiver où l’on aime à s’attarder au lit. Quant à moi je n’ai pas de mérite à me lever n’importe dans quelle saison, parce que l’insomnie au lit m’est insupportable. Tu sais que tu as Sénat à trois heures, mais comme tu l’as très bien dit hier, c’est à peine si cette séance d’ouverture mérite que tu en tiennes compte à moins que ce ne soit comme prétexte à promenade. Hélas, mon grand adoré, il va falloir que j’écrive à la pauvre Mme Chenay [1] une lettre que tu aurais bien dû écrire toi-même pour lui adoucir ton refus de la recevoir ce mois-ci après deux ans d’absence. Mais enfin, puisque tu le veux, je vais le faire séance tenante et le moins mal que je pourrai. Cela ne doit pas nous dispenser, pourtant, toi et moi, d’acheter des souliers dont nous avons le plus grand besoin tous les deux. Je t’aime, je t’aime, je t’aime.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16403, f. 71
Transcription d’Yves Debroise assisté de Florence Naugrette
a) « semies ».