29 novembre [1844], vendredi matin, 10 h. ½
Bonjour, mon petit Toto chéri, bonjour mon pauvre petit travailleur bonjour, bonjour comment vas-tu ce matin mon cher amour ? J’ai pensé à toi toute la nuit quand je ne dormais pas, cela va sans dire, mais aussi quand je dormais, en rêve, j’étais avec toi toujours. Je peux dire que depuis douze ans ma pensée ne t’a pas quitté un seul instant. C’est ce qui fait ma vie. Si je n’étais pas toujours avec toi, au moins par la pensée, je ne pourrais pas vivre je n’en aurais pas le courage.
Tu vas avoir un redoublement de travail pendant quinze jours, mon pauvre bien-aimé, mais où prendras-tu la force de travailler plus que tu ne fais déjà ? Quand je pense à ce que tu fais tous les jours, j’en suis effrayée. N’oublie pas, mon adoré, que tu m’as promis de venir tous les jours. Que je te voie seulement et je serai tranquille et presque heureuse. Mais ne pas te voira du tout cela me serait odieux et insupportable. Je compte sur ta bonne promesse, mon Victor bien-aimé et je prie Dieu de te donner la santé et la force en raison de ton courage et de ta bonté surhumaine.
Je te prierai de tâcher de me mener une fois auparavant à la pension de ma fille pour m’entendre avec Mme Marre au sujet de son travail. L’avis que m’a donné son excellente sœur [1] n’est pas à dédaigner. Je n’aime pas que cette dame seb soit abstenue de tout remerciement, sinon pour moi, au moins pour toi qui as daigné te déranger pour l’obliger [2]. Je crois très prudent de ne laisser aucun vague sur nos positions respectives et cela d’ici au mois de janvier. Je te le demande mon cher amour avec le regret de te tourmenter. Ô va je t’aime.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16357, f. 105-106
Transcription d’Yves Debroise assisté de Florence Naugrette
a) « voire ».
b) « ce ».