Guernesey, 18 mars 1858, jeudi soir 7h ½
C’est bien le moins qu’après avoir écrit pour les autres ce soir, je gribouille un peu pour moi à présent, mon cher petit homme, n’est-il pas vrai ? Et cela, sans préjudice de la DISCRÉTION que je vous dois et que je serai heureuse de vous payer, reconnaissance à part, que je tiens à vous garder au plus profond de mon cœur. En attendant, Suzanne est allée porter votre lettre à la grande poste en portant l’album chez Mlle Loisel. Chemin faisant, elle a dû entrer chez toi à 7 h. 10 minutes sous le prétexte de donner un bonnet à faire à Marie (à son domicile), mais cette surveillance de la rhubarbe sur le séné me paraît un peu illusoire et je crois que cette fois, comme toujours, l’œil du maître est le plus clairvoyant et le moins facile à tromper. Mais voilà justement Suzanne qui revient avec le beau projet de s’acheter pour son ménage futur un BOIS de lit en FER. Quand je pense que ma PELLE vous paraît aussi folâtre que ce FOURGON Suzannien. J’en suis confondue de douleur ! Juliette
BnF, Mss, NAF 16379, f. 61
Transcription d’Anne-Sophie Lancel assistée de Florence Naugrette