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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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24 janvier [1848], lundi matin, 9 h.

Bonjour, cher adoré bien-aimé, bonjour mon bonheur, bonjour ma joie, ma vie, mon âme bonjour. Je pense à toi, je rêve de toi, je t’aime, je te désire, je t’attends et je t’adore. Cependant je veux que tu dormes beaucoup et que tu ne te lèves que très tard. Pauvre piocheur c’est bien le moins que tu te reposes quelques fois. D’ailleurs je le veux DORMEZ à votre tour. En attendant, je vais me disposer à aller à la messe de cette pauvre Mme Burgot. Je pense que je serai revenue pour midi. Dans tous les cas cela ne pourrait pas tarder beaucoup et tu pourrais venir m’y chercher si tu en as le loisir, ce que je n’ose pas espérer. Je t’aime, je t’aime, je t’aime, mais cela ne suffit pas pour te donner le temps de l’entendre. C’est à peine si tes beaux yeux rencontrenta les miens une fois ou deux par soirée. Ce que j’en dis n’est pas pour te grogner au contraire c’est pour te dire que tu es mon pauvre amour digne de toute pitié, de toute tendresse, de tout amour, de toute admiration et de toute adoration. Voilà ce que ce regret exprimé contient sans parler de tout ce qu’il y a de plus encore au fond de mon cœur.

Juliette

MVH, 9016
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Michèle Bertaux

a) « rencontre ».


24 janvier [1848], lundi après-midi, 2 h. ½

Je m’étais bien trompée, mon adoré, en pensant que je serais revenue à midi. À midi ¼ le corps entrait seulement à l’Église [1]. Enfin voici la dernière cérémonie de ce monde accomplie pour cette pauvre vieille femme. Que Dieu lui fasse un doux accueil. Malgré la chaufferettea que m’avait prêté la donneuse d’eau bénite je mourrais de froid et je suis revenue avec un mal de tête hideux. Dans ce moment-ci surtout je suis comme une hébétée. J’espère que cela ne durera pas et que cela tient à mon séjour trop prolongé dans l’Église qui, par parenthèse, est la plus glaciale de tout Paris. D’ailleurs si tu viens de bonne heure tout sera oublié et guéri. La question est que tu m’apportes le remède bien vite. Cher petit homme, mon Toto adoré, je serai bien contente quand tu auras fini ton travail. D’abord pour toi, bien pour toi, mon pauvre homme et un peu pour moi qui ai bien besoin de tes baisers, de tes sourires et de ton amour. Malheureusement nous n’en sommes pas encore près. Mais cela ne m’empêche pas de le désirer. Il faut bien que je mette quelque chose sur ces longues journées solitaires pour les égayer un peu. J’y mets l’espoir d’un bonheur encore bien lointain mais en qui j’ai confiance parce que c’est de toi qu’il me viendra.

Juliette

MVH, 9017
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Michèle Bertaux

a) « chauffrette ».

Notes

[1Ce jour-là ont lieu les obsèques de Mme Burgot.

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