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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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10 h. 45, 25 octobre [1838], jeudi

Je t’écris mon bon ange, avec ma Claire auprès de moi, [illis.] très content. Elle est très radieuse, c’est décidément une très bonne fille. Au reste, cette petite lueur de joie, ce petit rayon de contentement, me fait mieux sentir à quel point je t’aime.
Je rapporte tout à toi, je ne vois que toi. Tu es ma vie de chair et de sang, d’esprit et d’âme. Tu es tout pour moi. Si tu cessais de m’aimer, je mourrais bien sûr, et ce n’est pas une exagération mon adoré. Je le sens comme je te dis. Viens que je te baise vilain petit homme. Vous me promettez toujours plus de beurre que de pain, vous êtes joliment revenu cette nuit hein ? Voime, voime, vous êtes un joli garçon.
Je vais écrire à Mme Kraft pour la remercier, et lui annoncer la bonne nouvelle de ses trois loges qui sont un véritable tour de force pour ce jour-là. Merci mon bel ange, merci mon adoré, vous êtes un très bon petit homme, excepté en AMOUR. Je vous aime, je ne compte pas beaucoup sur vous aujourd’hui ni demain, pauvre homme, plus ça ira et pire ce sera. Heureusement que nous touchons à la fin de nos maux.
Je compte sur toi ce soir, je te fais faire un bon petit souper. Je t’aime de toute mon âme.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16336, f. 85-86
Transcription d’Élise Capéran assistée de Florence Naugrette


25 octobre [1838], jeudi soir, 6 h. 30

Je vous surveille mon cher petit homme, prenez garde à vous. J’ai détaché mes alguazils [1], ainsi garde à vous, garde à vous, garde à vous. Ne manquez pas non plus de venir souper ce soir si vous tenez à me faire le plus grand bonheur que je puisse éprouver avant, pendant, et après tout.
J’ai jeté au feu la lettre de cette Gotton qui vous demande des places d’une manière si mystérieuse. Vous aurez la bonté de ne lui donner que votre pied dans le cul si elle vient pour les demander en personne.
Vous savez que j’ai un tas de pavots à vous broyer ! Je veux en avoir d’avance pendant les premières représentations de Ruy Blas, aussi je vais m’installer au coin de mon feu sans bouger. Peut-être même ne lirai-je les journaux que ce soir dans mon lit.
Ma Claire est là, résignée et de bonne humeur. Tout lui est bon à cette petite, elle est vraiment bonne fille, nous la récompenserons de cela un de ces soirs.
Papa est bien i, je l’aime de toute mon âme, mais il ne faut pas qu’il me trahisse.
Quel bonheur mon adoré, que tu ne te sois pas trouvé sous cette barre de fer quand elle est tombée, c’est hideux de penser que tu pouvais y être. Mon Dieu fais bien attention à toi mon adoré, au théâtre, et partout et aime-moi seulement la moitié de ce que je t’aime, ce sera assez pour me faire la plus aimée et la plus heureuse des femmes.

BnF, Mss, NAF 16336, f. 87-88
Transcription d’Élise Capéran assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Le mot « alguazils », qui désigne en espagnol les gendarmes, figure dans Ruy Blas.

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