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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Jersey, 12 octobre 1854, jeudi après midi, 4 h. ½

Me voici revenue, mon pauvre bien aiméa, mais aussi peu contente que lorsque je suis partie car je sens que tu es fâché toi-même et par ma faute. Aussi, tant que nous n’aurons pas fait la paix, je serai triste et malheureuse. En attendant, je te gribouille mes très humbles regrets avec l’espoir que tu les liras avec ton indulgence habituelle.
Je viens de rencontrer Charles et Allix [1], le masculin, bras dessus, bras dessous dans la plus grande intimité et se tutoyant comme des êtres qui auraient gardé des sénateurs ensemble. Tout cela est bien fraternel et bien familialb, même pour des républicains qui en font leur état. Après cela toutes ces choses perdent beaucoup de leur signification dans la bouche du jeune Charles et le premier engouement passé il ne reste rien de toutes ces passions à feu et à sang heureusement pour lui et pour toi. Je ne sais pas pourquoi je m’occupe aussi longtemps des affaires particulières de ce beau Don Charles. Je ferais bien mieux de veiller aux miennes et de tâcher de ne pas te faire fuir de chez moi quand je voudrais au contraire t’y retenir au prix de mon sang. Malheureusement je perds de jour en jour ce secret-là et bientôt je l’aurai oublié tout à fait. À force de t’aimer trop je ne sais plus me faire aimer assez ; de là mon impatience, mon irascibilité de caractère et mon chagrin. heureusement je touche à ma fin et bientôt il ne sera plus question de moi qu’en de profundisc. Mais jusque là pourtant je veux tâcher de ne t’être pas trop à charge et pour commencer je ris à pierre fendre. Il est vrai que la nuit approche et que tu ne viens pas, toute chose qui… Justement te voilà, pardon ! Je ris tout à fait, quel bonheur…

Juliette

BnF, Mss, NAF 16375, f. 335-336
Transcription de Chantal Brière
[Blewer]

a) « aimée ».
b) « famillial ».
c) « déprofondis ».

Notes

[1Les frères Émile Allix et Jules Allix sont amis de Hugo.

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