Guernesey, 15 mai 1859, dimanche matin, 8 h. ½
Bonjour, mon cher adoré bien-aimé, bonjour. Comment as-tu passé la nuit ? Bien, je l’espère et je m’en fais une joie par anticipation de certitude.
Je viens d’aller voir mon chef qui ne perd pas à être vu au grand jour, au contraire, mais tout joli qu’il est, vous êtes encore et sereza toujours mon plus beau CHEF ! et la cimeb la plus haute de votre arbre généalogique. Merci, mon adoré bien-aimé, merci de ton charmant et précieux cadeau, merci surtout du procédé si gracieux et si aimable dont tu l’as accompagné. Je ne finirais pas de te remercier, mon bien-aimé, du plaisir que tu m’as fait, si je n’écoutais que mon cœur, mais je crains de t’ennuyer en insistant plus longtemps.
Il paraît que ton Charles a fait confidence à Mlle A. [1] de l’ennui immense qu’il éprouve à Londres. Il lui dit encore qu’il lui paraît difficile d’y rester un mois même avec tout ce qu’il a à voir d’intéressantc. Quant à moi, je serais charmée que l’expérience eût ce résultat de ramener toutes ces brebis au bercail, guéries pour toujours de l’envie de courir la prétentaine. En attendant, j’espère que nous aurons une bonne petite soirée et un bon petit dîner ce soir. En attendant, je te baise de fond en comble.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16380, f. 129
Transcription de Mélanie Leclère assistée de Florence Naugrette
a) « serai ».
b) « cîme ».
c) « interressant ».