Dimanche matin [30 août 1835], 10 h. moins 10 m.
Bonjour, mon adoré, comment va ton rhume ? As-tu bien reposé cette nuit ? M’aimes-tu ?
J’aurais bien besoin de savoir tout cela, et puis j’ai bien envie de te voir, tu m’avais tant promis que tu viendrais. Vous voyez bien comme vous êtes. Et dire que je n’ose pas vous en vouloir dans la crainte que vous n’ayez employé votre temps à travailler tandis que la vérité est que vous vous amusez à faire des bêtes à trois têtes, et de l’esprit à trois cornes. Voilà sans aucun doute l’exacte vérité. Moi, pendant ce temps-là, j’use mon cadavre à vous désirer. Je te vas soigner le caurp aussi quand tu viendras.
Voilà pourtant huit jours pleinsb que nous avons quitté notre petite maison roulante où nous étions si heureux [1]. Je voudrais bien y être encore. Je passerais même un marché pour y demeurer toujours avec toi. De penser à cela me rend triste, je voudrais retourner en arrière d’un mois, j’aurais du moins l’espoir de partir dans quelques jours avec toi. Là, je suis vraiment triste, je ne sais pas si de copire vos vers va me redonner du cœur au ventre, mais en attendant, je suis très mouzon.
En d’autres termes, je t’aime, je t’adore, je te désire, je ne suis contente qu’avec toi.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16324, f. 238-239
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) « huit jours plein ».