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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Paris, 23 novembre [18]77, vendredi soir, 5 h.

Ma gredine de restitus a beau s’enfuir quand je l’appelle depuis ce matin, il faut qu’elle y passe corps et âme et cela séance tenante. Autre guitare, nous nous voyons si peu au repas, toi zé moi, que nous avons à peine le temps d’échanger un petit : Bonsoir, un petit : Bonjour bien secs, et que cette mince pâture au bec [1] n’emplit même pas la plus petite de mes dents creuses. Sans compter que je n’ai pas le temps de te consulter sur rien, ni de raccorder mes souvenirs avec les tiens pour les invitations. Je viens d’envoyer chez Carjat qui n’était pas chez lui. On a laissé la lettre espérant qu’il rentrerait assez tôt pour pouvoir venir dîner avec nous ce soir mais on vient de me faire dire qu’il ne pourra pas venir. Demain j’écrirai aux Molinari quand nous serons convenus ensemble du jour. Toutes ces chaussures d’auvergnats qui ne sont pas châles mais qui tiennent de la plache me laissent à peine assez d’espace pour y coucher mon amour tout de son long, témoin ce pauvre gribouillis tout hérissé de riens ennuyeux comme la pluie qui tombe en ce moment et la politique crottée de l’Élysée et autres lieux aussi fangeux. Et pourtant je t’adore.

BnF, Mss, NAF 16398, f. 319
Transcription de Guy Rosa

Notes

[1Citation de Ruy Blas, où Casilda se moque ainsi du vieux Guritan qui soupire en vain pour la Reine : « Il attrape, après un jour d’attente, / Un bonjour, un bonsoir, souvent un mot bien sec, / Et s’en va tout joyeux, cette pâture au bec. » (II, 1, v. 630-632).

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