Guernesey, 23 mars [18]70, mercredi matin, 7 h. ¼
Cher bien-aimé, j’envoie mon bonjour le plus tendre au devant de ta bonne nuit pour l’en remercier et te féliciter. Si tu es déjà levé, comme c’est probable, tu dois voir en même temps que moi en ce moment même un étonnant effet de soleil, de nuages, et de pluie, sur Serk. Voilà près d’un quart d’heure qu’il dure et il ne paraît pas encore près de finir. Ce spectacle m’intéresse d’autant plus que je suppose que tu le regardes en même temps que moi. Mais, tout attrayant que soit ce ciel giboulard, il ne nous promet pas poire molle [1] pour le reste de la journée. Je n’en suis pas autrement fâchée car j’ai de quoi remplacer tous les soleils absents avec les deux articles de tes vaillants et prodigieux fils [2]. Je te prie bien tendrement de leur dire combien et comment je les admire et les remercie avec reconnaissance de leur bon souvenir à tous les deux. Je te fais la même prière pour ton cher P. Meurice quand tu lui écriras. Toi je t’adore.
BnF, Mss, NAF 16391, f. 83
Transcription de Jean-Christophe Héricher assisté de Florence Naugrette