Guernesey, 25 sept[embre] [18]72, mercredi, 6 h. ½ du soir.
Cher bien-aimé, je finis ma journée par où je voulais la commencer si je n’en avais pas été empêchée par les préparatifs qui devaient servir Demain. Heureusement que ce que je te gribouille le matin mon cœur le dit à tous les instants de ma vie. L’heure n’y fait rien. Je t’aime comme je respire. Je t’appartiens tout entière et toutes mes actions comme toutes mes pensées convergent vers toi. Je t’adore. Je regrette que le sursis qui nous laisse un jour de plus Petit Georges et Petite Jeanne soit dû à un bobo de ton fils Victor [1]. Mais puisqu’il n’y a rien de grave pour lui et que ce n’est qu’une précaution conseillée par le médecin je mettrai à profit tout le temps que Dieu voudra bien nous laisser ces deux chers petits êtres. C’est la seule manière je crois de le prier de nous les rendre bientôt. J’ai reçu tout à l’heure de la part de Garnier un envoi bien précieux c’est plusieurs groupes d’eux avec leur mère et deux merveilleux portraits de ton cher Victor. Je l’en remercierai ce soir quand il viendra dîner chez toi. Je baise tes pieds, tes mains, tes ailes. Je t’adore.
BnF, Mss, NAF 16393, f. 271
Transcription de Bulle Prévost assistée de Florence Naugrette