Guernesey, 24 février [18]70, jeudi matin, 8 h.
Bonjour, mon cher grand bien-aimé adoré, et Salut à la République dont le vingt-deuxième anniversaire se lève aujourd’hui. Puisse-t-il te rendre à ta chère France cette année [1] afin que tu lui rapportes tout ce qui lui manque depuis que tu l’as quittée : LUMIÈRE, HONNEUR, PAIX ET BONHEUR. C’est le vœu désintéressé et héroïque de mon cœur car en le faisant je lui sacrifie plus que ma vie peut-être. Ma pensée recule devant la possibilité de ce malheur sans fond pour mon pauvre amour et s’arrête à ceci que Dieu ait pitié de mon âme. J’espère que tu as passé une bonne nuit et que ton petit pot se tient bravement devant le feu. Je te souris, je t’aime, je t’adore, je te bénis.
BnF, Mss, NAF 16391, f. 38
Transcription de Jean-Christophe Héricher assisté de Florence Naugrette