Guernesey, 20 juillet [18]68, lundi matin, 7 h.
Je compte sur ta bonne nuit, mon adoré bien-aimé, pour faire compensation à la maussaderie de la mienne qui a été plutôt grise que blanche et par-dessus tout brûlante. Décidément la chaleur ne favorise pas mon sommeil. Mais tout cela n’aurait aucune importance si tu n’avais pas la bonté de t’en occuper plus que de raison. La preuve, c’est que, bonne nuit ou non, je me porte comme le plus vieux des Ponts-Neufsa. Est-ce vrai ? Eh ! bien, alors ? … Qu’avez-vous à répondre ? En attendant, j’entrevois des choses terribles pour mon pauvre Gwynplaine [1], ce qui ne me fait pas rire. C’est ton habitude d’être sans pitié pour tes personnages et pour tes lecteurs et tu as raison puisque Dieu lui-même en fait autant envers ses créatures, ce qui n’empêche pas qu’on vous admire et qu’on vous adore tous les deux comme la grandeur et la bonté suprême.
BnF, Mss, NAF 16389, f. 201
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) « des Pont-Neufs ».