Guernesey, 5 juillet [18]68, dimanche, 7 h. ½ du m[atin]
Mon bonjour a presque honte de se montrer si tard, mon cher adoré, et je ne lui trouve d’excuse que dans ma débauche de sommeil. Il est impossible de se livrer à plus d’excès de pionçage que je le fais depuis quelque temps. Je n’en cherche pas le motif mais je m’y livre avec une douce bonne volonté qui fait sourire ma paresse. Cet aveu cynique une fois fait, je serai bien heureuse de savoir que tu as passé une bonne nuit et que tout est à souhait dans ton cœur et dans ta vie. Quant à moi, je t’adore et je jubile de la pensée de reprendre collation demain. Il y a si longtemps que je soupire après elle que j’éprouve une joie immodérée de la savoir si près de moi maintenant. Je ne pense pas qu’il pleuve encore aujourd’hui. Saint Médard tient bon et je crois qu’il finira ses quarante jours sans [illis.]. Je ne sais pas jusqu’à quel point cela plaît à son hydrothérapie mais le fait est qu’il doit rissoler là-haut autant que nous ici. Sur cette belle réflexion, je vous tire la langue et ma révérence.
BnF, Mss, NAF 16389, f. 186
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette