12 août [1840], mercredi matin, 8 h.
Bonjour, mon Toto chéri, bonjour mon bon petit bien-aimé. Bonjour je t’aime. Tu es à Saint-Prix [1], mon adoré, et je m’en étais presque douté hier. Je crains de me douter encore aujourd’hui que tu ne ramènes tout ton monde de la campagne pour assister au triomphe de Charlot [2] et que je te voiea à peine pendant quatre ou cinq jours. Je sais bien que c’est nécessaire mais cela ne me suffit pas pour m’empêcher d’être triste et malheureuse. J’ai encore été un peu souffrante cette nuit, je le suis aussi ce matin. Je vais prendre un bain qu’on est allé me chercher. Déjà hier je voulais en prendre un bain mais il a fait trop froid tout d’un coup et j’avais trop de coliques. J’ai la bouche pleine d’affetes [3]. Est-ce comme ça que cela s’écrit ? Toujours est-il que ma langue, ma bouche, ma gorge et mes entrailles sont comme brûlées et que j’ai la fièvre. Nous n’avons cependant fait aucun excès de gargoteb aux Marronniersc [4] aussi je n’y comprends rien. Après ça je m’en moque et si tu étais auprès de moi je serais bien vite guérie. Je t’aime Toto, tu ne le sauras jamais assez. Je t’aime toujours plus et toujours de toute mon âme.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16343, f. 89-90
Transcription de Chantal Brière
a) « voye ».
b) « gargotte ».
c) « Maronniers ».