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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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14 février [1840], vendredi, midi ¾

Bonjour mon bon petit homme, bonjour mon bien-aimé, comment cela va-t-il mon chéri ? Comment vont tes yeux ? Comment va toute ta chère petite personne adorée ? J’ai pensé à toi mon pauvre ange jusque dans mon sommeil car toute la nuit j’ai rêvé de toi. Je voudrais te voir pour être bien sûre que cet excès de fatigue que tu as combattu cette nuit n’a pas eu de suite. Je suis tourmentée cependant à tout ce que tu fais et à touta ce que tu as à faire. Mon Dieu, mon Toto, ménage-toi et surtout arrête-toi quand tu te sens fatigué comme cette nuit. Je voudrais bien ne pas te parler d’une petite idée de jalousie qui m’est venue à propos de cette revue, de ce recueil ou de cette chose, comme tu dis, que tu m’as apportée hier et où il en manque juste la moitié. Je connais assez les habitudes de ta maison pour savoir qu’on ne met pas au vieux papier un journal du jour ni de la veille dans lequel on parle de toi et que tu n’as pas lu. Enfin mon adoré c’est peut-être vrai mais ce n’est pas vraisemblable et il faudra que je t’en reparle encore. D’ailleurs la jalousie c’est de l’amour ainsi je ne perdrai pas mon temps ni toi non plus dans une explication qui te prouvera que je t’aime passionnément et dans laquelle, je l’espère, tu me prouveras que tu es un bon et sincère petit homme. En attendant je t’aime de toute mon âme et je te désire de toutes mes forces. Pense à moi et tâche de venir très tôt. Tu dois avoir besoin de bassiner tes yeux adorés et j’ai tout préparé pour cela. Baise-moi mon ravissant petit homme et aime-moi.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16341, f. 160-161
Transcription de Chantal Brière

a) « tous ».


14 février, vendredi soir, 5 h. ½

Voici une bien longue journée et bien triste, mon Toto, car je ne t’ai pas vu. Je t’aime pourtant de manière à t’attirer vers moi si la loi de l’attraction existait pour les amoureux. J’ai vu Mme Guérard tantôt, elle m’a fait une visite fort courte et m’a chargée de mille compliments pour toi. Elle me paraît du reste, sinona consolée, du moins résignée à son veuvage anticipé. Elle m’a dit qu’elle viendrait un jour me demander à dîner et qu’elle te prierait de la mener au spectacle. De la part d’une autre femme ce besoin de spectacle serait très significatif pour le pauvreb fou Guérard mais de la part de sa femme cela ne prouve rien sinona qu’elle s’ennuie et qu’elle veut se distraire honnêtement. En voici bien long sur Mme Guérard mais c’est qu’en vérité elle n’est qu’un prétexte pour me faire regarder dans mon cœur et pour m’y faire voir un amour éternel et tellement exclusif que je ne survivrais pas à notre séparation sous quelque forme que ce soit. C’est que je t’aime auparavant et après toute chose. Je t’aime plus que je ne vis ou plutôt c’est toi qui es ma vie, ma lumière, mon soleil, mon tout. Baise-moi, mon adoré, baise-moi de l’âme jusqu’à ce que mes lèvres s’appuient sur les tiennes et que mon souffle se mêle au tien. Je voudrais te voir, reviens vite mon Toto. Je vous dis que je vous aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16341, f. 162-163
Transcription de Chantal Brière

a) « si non ».
b) « paure ».

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