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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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23 avril [1839], mardi, midi ½

Bonjour, mon petit bien-aimé, bonjour mon petit chéri. Je vous écris levée et toutes mes fenêtres ouvertes. Nous sommes donc tout à fait des vieux amoureux ? Il n’y aura donc plus jamais des réminiscencesa vers le temps passé si heureux et si triomphant comme pourrait en témoigner les grands arbres et les petits taillis des Roches et autres ? Ce temps-là est passé, c’est fini, il n’y aura plus même de réminiscences ? C’est tout au plus si vous me permettrez les souvenirs ? En vérité, nous jetonsb nos choux bien gras et nous renonçons de bien bonne heure aux bonnes choses de la vie. Quant à vous, il est probable que vous n’y renoncez plus mais que c’est une simple substitution de COMPAGNONNE. C’est bien, mais faites en sorte que je n’en aie jamais la certitude car elle et vous passeriez un mauvais quart d’heure. En attendant, laissez-moi douter et vous aimer comme une pauvre femme qui croirait qu’elle est aimée par son Toto. Je viens de voir une grosse araignée, mais comme c’était à midi et qu’elle ne m’annonçait que des soucis, je l’ai tuée sans pitié. C’est aujourd’hui que le sort de ma cuisine se décide, dans tous les cas, ce ne sera toujours qu’un affreux trou. Ce qui ne vaut pas mieux que deux. Je vous aime, Toto, je vous adore, mon petit homme. Baisez-moi et tâchez de venir tout de suite, je vous embrasserai bien.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16338, f. 85-86
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « réminiscence ».
b) « jettons ».


23 avril [1839], mardi soir, 8 h. ½

Mon cher petit homme, je vous aime. Je vous aime et je vous aime. Je vais travailler tout à l’heure à mes chemises. Vous, vous devriez me faire la surprise de venir me voir. Cela ne vous dérangerait pas beaucoup et me ferait un très grand bonheur. Je vous aime, Toto. Il paraît que Mme Pierceau est rentrée hier derrière nous et qu’elle a été très vexée de nous avoir manqués. Au reste, c’est un très petit malheur qui m’a donné chemin faisant le plaisir d’être avec vous une heure de plus.
Je ne vous écris pas encore sur mon grand papier puisqu’il y en a encore une feuille de l’autre, mais il était temps d’en apporter. Cependant Mme Pierceau est presque d’aussi mauvaise humeur que moi dimanche. Elle crie, elle tempête, c’est à ne pas s’entendre. Heureusement que je suis bon cheval de trompette et que je m’effraye pas du bruit. Mon Toto, mon Toto, je veux que vous veniez déjeuner avec moi demain matin absolument ou je me fâche pour de bon. Jour Toto. Papa est bien i. Nous verrons cela demain à l’ŒUVRE. Baisez-moi, vieux vilain, et prenez garde à vos chers petits pieds. Vous avez des paniers à la place de BAUTTES et cela n’est pas prudent de ce temps-ci.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16338, f. 87-88
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

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