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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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25 mars 1841

25 mars [1841], jeudi matin, 10 h.

Bonjour mon Toto chéri, bonjour mon amour. Comment vas-tu ce matin ? J’ai bien envie d’arrêter là ma lettre, quand on a le cœur noir c’est le cas de laisser le papier blanc à la manière des Chinois qui portent le deuil en blanc. D’ailleurs, je suis si sûre de l’effet répulsif que te font mes paroles et ma personne que ce serait te rendre service que de te les [supprimera  ?] à présent et dans les siècles des siècles, ainsi soit-il.
Il fait bien beau ce matin, mon cher adoré. Je vais me lever tout de suite pour prendre un peu de soleil et d’air pendant que l’air est si pur et si doux, en même temps je surveillerai ton ouvrière [1]. Je viens de renvoyer chez Lambin qui avait oublié de marquer les deux brosses à peigner et j’ai le préjugé de ne pas profiter de l’oubli d’un marchand de pommadeb, ce qui est absurde. J’espère que tu emporteras ce soir ton enveloppe faite, sinon bien faite, mais tu en seras quitte pour la faire fignoler par ton tailleur [2].
En attendant sois heureux, porte-toi bien et pense à moi sans ennui si tu peux. Je me lève. Bonjour Toto, bonjour mon petit Toto.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16344, f. 279-280
Transcription de Gwenaëlle Sifferlen assistée de Florence Naugrette

a) « suprimer ».
b) « pomade ».


25 mars [1841], jeudi soir, 4 h. ½

Si tu étais venu assez tôt, mon petit bien-aimé, j’aurais pris un bain car je me sens un peu mal au bas-ventre mais comme nous n’avons pas le sou ni l’une ni l’autre, la servarde et moi, je m’en passe. Du reste il fait un temps divin, pour en agripper le plus que je peux j’ai toutes mes croisées ouvertes. Je pense que ta robe sera finie ce soir et que tu pourras l’emporter. Je vais faire faire immédiatement mes rideaux, cela commence à devenir urgent car rien n’est plus vilain et plus gênant que les chiffons que je tends aux croisées tous les soirs.
Je pense, mon petit homme, copier de l’album vert ce soir [3]. Les jours où j’ai trop peu de temps à moi je ne copie pas parce que cela me gêne. Aujourd’hui, après que j’aurai fini quelque chose à moi, je te copierai à mort.
Mon Dieu, quel beau temps et que je te trouve heureux de pouvoir en profiter à ton aise. Jour Toto, jour mon petit o. Il faudra que je te parle ce soir de la serrure et du ramonage de la cheminée, je ferai faire ce que tu jugeras le plus convenable. D’ici là je t’embrasse de tout mon cœur.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16344, f. 281-282
Transcription de Gwenaëlle Sifferlen assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Pauline.

[2Depuis quinze jours, Juliette a emprunté à son amie Laure Krafft une robe de chambre qui sert de modèle à l’ouvrière Pauline afin d’en tailler une neuve pour Hugo. Malheureusement, elle se plaint souvent de la fainéantise et de l’inefficacité de celle qu’elle surnomme Penaillon ou qualifie d’affreuse « couson ». Elle déplore donc le fait d’avoir insisté pour s’en occuper alors que le tailleur de Hugo semblait être plus compétent pour cela (voir la lettre du 24 mars).

[3Cet album appartient à Hugo, et pas à Juliette comme l’album rouge par exemple, où elle conserve les petits mots que le poète lui écrit. Il y rédige le brouillon de ses futures œuvres.

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