Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1855 > Mai > 15

15 mai 1855

Jersey, 15 mai 1855, mardi après-midi, 2 h.

Je t’aime, mon cher petit homme, tu ne le sais que trop. Aussi n’est-ce pas pour toi mais pour moi, pour avoir le plaisir de faire résonnera au dehors ce mot qui me brûle l’âme : je t’aime, que je saisis tous les prétextes de l’écrire. Si tu savais comme j’ai été heureuse hier au soir de te reconduire jusqu’à la porte de ROSE. Il me semblait que toutes mes joies d’autrefois étincelaientb parmi les étoiles et que nos deux âmes se touchaient en marchant. Mon bonheur m’a quittéec au seuil de Rose en même temps que toi. J’espère que tu me l’auras fidèlement gardé et que tu me le rapporteras bien tôt. D’ici là je m’ÉPÊCHE d’aligner pattes de mouche devant pattesd de mouche pour que vous soyez content de votre pauvre Juju et que vous ne songiez plus à lui adjoindre de collaborateur, et encore moins de collaboratrice. Vous me direz si vous êtes bien amusé chez Rose et s’il y avait beaucoup de jolies PHAMES.
En attendant, je veux conserver ma SÉRINITÉ quitte à la convertir en rugissements accentués dès que la vraie vérité me sera connue. De votre côté, mon très oublieux petit Toto, tâchez de penser au cadeau de Charles Asplet. Nous n’avons plus que deux jours devant nous, ce qui est peu. Le moment est opportun à tous les points de vue, aussi je vous recommande de vous occuper de la chose séance tenante et pendant que vous en avez la mémoire ennuyéee.
À propos, depuis que j’ai exiléf mes pauvres fleurs du logis, j’ai un mal de tête hideux. Vous voyez que ma lâche concession pour vos préjugés hygiéniques ne m’a guère réussi, ce qui ne m’empêchera pas de recommencer à l’occasion tant l’obéissance passive [1] fait partie maintenant de ma nature de Juju.

BnF, Mss, NAF 16376, f. 203-204
Transcription de Magali Vaugier assistée de Guy Rosa

a) « raisonner ».
b) « étincellaient ».
c) « quitté ».
d) « patte ».
e) « ennuiée ».
f) « exilées ».

Notes

[1« À l’obéissance passive » est un poème des Châtiments.

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne