1 h. ½ du matin
J’étais prévenue que je ne te verrais peut-être plus de la soirée, et cependant, au moment où je t’écris, je me sens aussi triste et aussi découragée que je l’aurais été, t’attendant à coup sûra. Qu’est-ce que cela prouve ? Que je t’aime. Que je ne compte que sur toi pour vivre, que sur ta présence pour être heureuse - et que lorsque tu viens à me manquer, je suis sans force et sans patience, je souffre et je pleure. Cependant, au moment où je t’écris, il me reste un peu d’espoir. Je pense que, peut-être, tu pourras t’échapper de chez toi et que dans quelques heures au plus, je t’aurai là, à côté de moi, dans mon lit, sur ma bouche, sur mon cœur… sur… ma foi, devinez – J’espère aussi que vous aurez eu la probité de m’écrire une bonne et LONGUE lettre pour m’indemniser de l’ennui que j’ai eu, et puis encore pour me rembourser celle-ci – qui est un peu gigantesque –
Toute la soirée, je n’ai pensé qu’à toi, toute la soirée je t’ai aiméb, toute la soirée je t’ai désiréc, toute la nuit, je vais rêver de toi – Bonsoir – À bientôt si tu m’aimes comme je t’aime – et –
Ici mille
baisers.
Julietted
[Adresse]
Pr le plus aimé des hommes
Pr mon Victor
BnF, Mss, NAF 16322, f. 144-145
Transcription de Jeanne Stranart et Véronique Cantos assistées de Florence Naugrette
[Souchon, Massin]
a) « sûre ».
b) « aimée ».
c) « désirée ».
d) Juliette encadre ces mots :
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