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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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18 octobre [1844], mardi matin, 11 h. ¼

Bonjour, cher petit bien-aimé, bonjour, mon cher adoré, bonjour, mon âme, bonjour, ma joie, ma lumière, ma vie, mon Dieu, mon tout, bonjour, bonjour. Je t’aime. Comment vas-tu, mon Victor chéri ? Moi je continue d’avoir très mal aux yeux. J’ai mis de la pommadea encore ce matin pour me conformer à la prescription de l’imprimé. Nous verrons si cela me guérira plus vite.
J’ai vu la mère Lanvin ce matin. Elle venait pour ce pauvre M. Saint-Hilaire [1] qui paraît très affecté de ton silence. À tout hasard, et je l’ai approuvée, elle lui a dit que tu étais à la campagne. Moi je lui ai dit que tes yeux ne t’avaient pas permis de lui écrire encore. Du reste, il paraît que M. Asseline a envoyé son secrétaire chez lui pour s’entendre sur ce qu’il désirait. À quoi le pauvre bonhomme aurait répondu que c’était à toi qu’il fallait s’adresser. Je t’expliquerai cela plus longuement et peut-être plus clairement de vive voix tantôt car je sens que je n’en viendrai pas à bout autrement.
M. Pradier était attendu de jour en jour. S’il est revenu aujourd’hui, je le saurai demain matin et j’y enverrai Claire le soir.
Mon cher petit adoré, j’aurais bien voulu t’accompagner à Neuilly ce soir. Mais puisque tu crois que cela ne se pourra pas, je fais tout mon possible pour me résigner. Je t’aime mon Victor, je t’aime mon Toto adoré, tu ne le sauras jamais autant que cela est. Je te baise en désir et en pensée partout où un baiser peut trouver place.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16356, f. 263-264
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette

a) « pomade ».


18 octobre [1844], vendredi soir, 5 h. ¾

Je te sais occupé, mon cher bien-aimé adoré, hélas ! Et je sais encore que tu as un rendez-vous ce soir et que je ne dois pas espérer te voir avant minuit ou une heure du matin et je ne peux pas m’empêcher d’être triste en pensant que toute cette longue journée se sera écoulée sans t’avoir embrassé. Plus j’avance dans mon amour et plus je t’aime et moins je te vois, ce qui fait de ma vie un contraste douloureux que je sens mieux que je ne sais le dire. Cependant, mon pauvre ange, si je n’avais pas mis toute ma joie en toi, j’aurais été heureuse aujourd’hui car Mme Marre est venue me dire qu’elle gardait Claire au pair à partir du 1er janvier prochain. Elle en est fort contente depuis qu’elle est rentrée et elle espère que ce mieux se soutiendra toujours. Du reste, la pauvre femme était très inquiète de la jeune fille. Demain je saurai si ses appréhensions étaient fondées, ce dont Dieu la garde car ce serait affreux.
Tu vois par tous ces détails, et avec la visite de Mme Lanvin, celle de Mme Triger tantôt, que j’ai été très occupée toute la journée. Mais tout cela ne satisfait pas le cœur, mon cher amour, au contraire il l’ennuie et l’irrite et lui fait paraître l’absence de ce qu’il aime plus longue et plus insupportable.

8 h. ½

Tu es venu, mon cher bien-aimé, je t’ai vu, j’ai le cœur desserré, je suis moins à plaindre et je t’aime. Mon Victor adoré, si tu ne vas pas chez V… ce soir [2], viens me voir plus tôt. D’ailleurs, vous le devez parce que cela m’empêche de me crever les yeux. En attendant, je baise vos quatre petites pattes blanches et je vous adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16356, f. 265-266
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette

Notes

[1À élucider.

[2Hugo rend régulièrement visite à un ami malade.

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