Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1849 > Avril > 8

8 avril 1849

8 avril [1849], dimanche soir, 8 h. ½

Je ne me plaindrais pas du chemin que tu as pris tantôt puisque j’ai pu t’y suivre des yeux plus longtemps. Mais, au point de vue de la propreté et de l’hygiène, je ne peux m’empêcher de te trouver absurde. En vérité tu aurais dû aller retrouver par un chemin plus court et plus propre. Une autre fois tu voudras bien ne pas y faire tant de façon. Cher adoré, mon beau Toto, quand donc mon tour viendra-t-il ? Il me semble que vous me trichez et qu’il a dû déjà se représenter bien souvent. Songez que si vous abusez de ma confiance c’est moi qui me présenterai et vous verrez de quel bois je me mouche. Avec tout cela je peux à peine profiter du peu de temps que tu as avec moi à cause des péronnelles qui se donnent rendez-vous chez moi le dimanche pour être sûres de me trouver. Et aucun moyen de m’y soustraire parce que la plupart viennent de très loin et me sont très attachées. Cependant je voudrais bien ne pas perdre une minute de ta bonne présence. Il faudra que je trouve un moyen de tout concilier : les intérêts de mon amour et les procédés de simple politesse envers mes visiteuses. Il faudra que tu m’y aides car je suis très peu ingénieuse de ma nature. Je ne sais que t’aimer tout bêtement et souffrir encore plus que . Baise-moi et tais-toi.

Juliette

MVHP, MS a8182
Transcription de Michèle Bertaux et Joëlle Roubine


8 avril [1849], dimanche soir, 9 h.

Je ne t’espère pas, mon bien-aimé, parce que je sais que tu es pris et confisqué par tout le monde et pour toute la soirée. C’est donc tristement et avec de tendres regrets que je t’écris ce gribouillis nocturne et mélancolique. Si j’étais généreuse je ne te parlerais pas de mes ennuis et je te rafraîchirais la mémoire de cette fragile qui souffre tant. Il me semble que cela te serait plus agréable que mes plaintives rabâcheries qui doivent te sonner comme une cloche dans les oreilles. Je pourrais encore te raconter l’effet gracieux que ton gâteau a produit sur l’imagination et la gueulardise de ces jeunes filles. Du reste elles n’avaient pas besoin de ce stimulant pour te trouver bon et gentil à croquer. Mais à quoi bon vous dire toutes ces choses dont vous ne vous doutez que trop par les POLEMA qui pullulent. Je ne veux pas vous donner de la fatuité à laquelle d’ailleurs vous n’êtes déjà que trop enclin. Pour vous ramener à une sage modestie je vous parlerai de moi et de mon amour, au point de vue de l’homéopathie car il n’y a pas d’homme, il n’y a pas d’ange, il n’y a pas de Dieu qui ne serait fier d’être aimé par une femme comme vous l’êtes par moi.

Juliette

MVHPMSa8183
Transcription de Michèle Bertaux et Joëlle Roubine

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne