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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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18 octobre [1847], lundi matin, 7 h. ¼

Bonjour, mon petit homme, bonjour, mon grand artiste, bonjour, le plus complet des Toto, bonjour qu’on vous dit, dans l’espoir que vous êtes de plus en plus satisfait de l’état de votre chère femme. Cependant je ne dois pas vous laisser ignorer que je me regarde comme flouée par vous hier au soir et que j’exigerai que vous me rabibochiez pas plus tard que ce soir, du trop peu de temps que vous ne m’avez pas donné puisque vous l’avez employé à faire je ne sais quelle correspondance. C’est bien le moins que vous me donniez quelques pauvres petites minutes franches de tout gribouillis.
À propos de gribouillis, je vous dirai que vos dessins me paraissent très beaux et que je viens de les serrer très précieusement parce qu’ils sont secs. Ne pouvant pas prétendre à en avoir de ceux-là, je vous supplie de me faire le mien le plus tôt possible afin que je m’en fasse honneur tout de suite. Vous savez que je suis toujours très pressée de jouir de mon bien, aussi vous ne vous étonnerez pas si je persiste, si je vous tourmente et si je vous canule [1] pour avoir mon dessin très vite. Cher adoré, c’est surtout pour mettre à l’épreuve ton inépuisable douceur et ta grâce affable sur lesquelles je ne me blaserai jamais.

Juliette

MVH, α 7987
Transcription de Nicole Savy


18 octobre [1847], lundi après-midi, 1 h. ½

Enfin nous pouvons chanter VICTOIRE car il paraît que tout danger a définitivement disparu et qu’il n’y a plus l’ombre de fièvre [2]. Bientôt, très bientôt, on mangera comme plusieurs ogresses et nous serons tous bien heureux si j’en crois les nouvelles de ce matin. Il ne faut plus penser aux angoisses passées, si ce n’est pour rendre plus sensibles et plus éclatantsa encore notre tranquillité et notre bonheur présents.
Maintenant, mon cher petit bien-aimé, je ne serais pas fâchée de faire avec toi une petite promenade un peu moins triste que les dernières que nous avons faites. Dans cette intention, je vais me dépêcher de faire mes affaires et de m’habiller, dans le cas où tu serais disposé à me faire sortir. J’ai un peu mal à la tête mais cela ne sera rien.
Je t’ai déjà dit ce matin que tes dessins étaient très beaux, je te le répète et même je suis prête à te donner de mon fameux papier si tu veux m’en donner un sinon de ceux-là, du moins m’en faire un tout de suite. Je dis tout de suite parce qu’avec toi CRÉDIT EST MORT et que ce serait duperie que de compter sur ta promesse pour le ressusciter. Donnant donnant, voilà ma générosité à moi. Si cela te va, je mets mon album à ta disposition pour prendre et pour recevoir. Surtout POUR RECEVOIR.

Juliette

MVH, α 7988
Transcription de Michèle Bertaux et Nicole Savy

a) « plus sensible et plus éclatant ».

Notes

[1Populaire : obséder, importuner (GDU).

[2Mme Hugo est guérie de la fièvre typhoïde.

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