Guernesey, 19 novembre 1857, jeudi matin, 10 h. ½
Vous m’oubliez, mon cher petit homme, mais moi je pense à vous toujours et je vous aime encore davantage, soit dit sans reproche, mais pour constater un fait trop évident. Vous vous êtes bien hâté de me quitter hier pour aller finir votre soirée en meilleure compagnie. Je ne vous en veux pas puisque c’est votre plaisir d’agir ainsi, mais je ne peux pas m’empêcher de vous regretter. Du reste je ne prends pas le chemin de vous retenir et de vous attirer davantage avec mes éternelles jérémiades couleur d’ennui. Parlons d’autre chose, mon cher petit homme, et laissons reposer un peu ta patience. Il fait un temps charmant ce matin, c’est grand dommage que tu sois occupé de toute façon car je t’aurais proposé d’en profiter [en ?] promenade au soleil. L’année prochaine, si tu es libre de ton temps, de ton cœur et de tes jambes, je te mettrai souvent en réquisition champêtre et sentimentale. En attendant, je me contente de ma belle SAMBRE [1] et je t’aime INTÉRIEUREMENT de toutes mes forces et de toute mon âme.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16378, f. 206
Transcription de Chantal Brière