Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1846 > Septembre > 21

21 septembre [1846], lundi soir, 10 h.

Es-tu arrivé, mon Victor bien-aimé ? Tout s’est-il bien passé durant le trajet [1] ? Penses-tu à moi ma vie ? M’aimes-tu mon doux adoré ? Quant à moi tout m’est un sujet de t’aimer davantage, absent, présent, heureux ou malheureux, je t’aime toujours plus. Le moment où je te vois, où je te parle, où je t’écris, où je pense à toi, est toujours celui dans lequel il me semble que mon âme trouve la faculté de t’aimer plus que plus, plus, plus, plus, encore plus. Comme tu le sais, j’ai eu M. Vilain à dîner avec Eugénie. Ils se sont en allés à neuf heures et demie. Du reste ce jeune homme est toujours très doux et très bon mais parfaitement insignifiant et terne. Il m’avait apporté des petits gâteaux et une caisse de confitures de Bar [2], toutes choses parfaitement inutiles et qui n’ont pas d’autre avantage que de faire dépenser de l’argent à un pauvre diable qui n’en a pas de trop, tant s’en faut. J’aurais mieux aimé qu’il ne fît pas cette dépense mais on ne m’a pas consultéea comme tu penses bien.
Cher bien-aimé, je voudrais savoir où tu es, ce que tu fais, où tu dors, ce que tu rêves et le reste. J’attends demain avec une impatience que tu devines sans peine, mais hélas ! c’est encore bien long vingt-quatre heures et je ne me figure pas d’avance comment je ferai pour y arriver sans découragement et sans amertume. Pour cela il faudra que ma pensée reste fixée sur les 24 heures de bonheur que tu m’as promises. C’est ce que je tâche de faire depuis que tu m’as quittée. Jusqu’à présent cela m’a beaucoup aidéeb mais je ne suis pas encore à demain soir, tant s’en faut. Enfin j’espère que j’y arriverai à force de t’aimer, de te désirer et de t’adorer en pensée, en cœur et en âme.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16364, f. 143-144
Transcription de Gwenaëlle Sifferlen assistée de Florence Naugrette

a) « consulté ».
b) « aidé ».

Notes

[1Hugo a accompagné son fils Charles à Vert-le-Grand. Juliette pense qu’il accompagne ensuite sa femme et sa fille à Rouen puis à Villequier.

[2S’agit-il de la confiture de groseilles de Bar-le-Duc, une préparation alimentaire sucrée, composée de groseilles blanches ou rouges épépinées à la main ?

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne