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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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28 mars 1880

Paris, 28 mars 1880, dimanche matin, 8 h.

Cher bien-aimé, je n’ai pas voulu achever de te réveiller ce matin pour te demander des nouvelles de ta nuit ; mais, si j’en juge d’après la mienne, tu as lieu d’en être satisfait. Le temps est redevenu aussi beau qu’avant-hier, ce qui ajoute une joie de plus à mon espérance, et à ma confiance ena une bonne promenade tantôt. En attendant, j’assiste au défilé des béguines et à leurs élèves qui reviennent déjà de la messe matinale dédiée, particulièrement le jours des grandes fêtes, aux couvents et aux domestiques, et qui permet, à ceux qui ont le temps de faire la grasse matinée dans leur lit, d’assister à la grand’ messe en musique sans être trop foulés. Comme avec le ciel il est, avec la messe, des accommodements [1]. Maintenant, je vais prêcher pour mon Saint, en te priant de tâcher d’être prêt à déjeuner avec nous à midi précis, afin de ne pas retarder le plaisir de tes chers petits enfants qui doivent ouvrir le bal d’enfants auquel ils sont invités à deux heures de l’après-midi. « La danse n’est pas ce que j’aime mais c’est le bonheur collectif de déjeuner en famille avec toi, ce qui vaut encore mieux que la fille à Nicolas [2]. »Je pense que tu auras une séance à donner au brave Lesclide pour déblayer un peu le tas hurlant de lettres à répondre, et qui urge de plus en plus. Fidèle à la tradition des œufs de Pâques, nos canesb [3] prolifiques en avaient caché cinq qu’on a trouvés ce matin et qui, avec les dix déjà connus, porte le nombre à onze. Bon exemple à suivre, qu’en dîtes-vous, cher maître ? Je vous conseille de couver cette forte idée, et d’en faire éclore quelque chose de charmant pour vos adorables marmots que j’aime autant que vous les aimez vous-même, c’est-à-dire de tout mon cœur.

[Adresse]
Monsieur Victor Hugo

BnF, Mss, NAF 16401, f. 87
Transcription de Blandine Bourdy et Claire Josselin

a) « à ».
b) « cannes ».

Notes

[1Citation de Tartuffe  : « Le ciel défend, de vrai, certains contentements, / Mais on trouve avec lui des accommodements », dit Tartuffe à Elmire.

[2Reprise d’une réplique d’Antonio dans la scène I de l’acte I de Richard Cœur de Lion de Sedaine : « la danse n’est pas ce que j’aime / mais c’est la fille à Nicolas / lorsque je la tiens par le bras / alors mon plaisir est extrême … ».

[3La famille Hugo élève des canards dans son jardin.

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