Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1849 > Octobre > 3

3 octobre [1849], mercredi matin, 7 h.

Bonjour, mon bien-aimé, bonjour. Il me semble que j’ai fait un affreux rêve dont je ne suis pas encore bien [éveillée  ?] depuis hier. J’ai honte de moi-même, je voudrais pouvoir me fuir et me renier. Je sens si bien que ce que je fais n’a pas le sens commun dans tous les cas, que je ne comprends pas comment il se fait que je te fasse de ces scènes absurdes dont le seul résultat est de t’éloigner et de te détacher de moi davantage. Je sens ces choses jusque dans le bout de mes ongles et cependant la folie de l’amour et de la jalousie est tellement aiguë chez moi que je ne peux pas résister à ses violences. Je t’en demande pardon, je me déteste, je me trouve ridicule et odieuse dans ce moment lucide mais rien ne me dit que je ne recommencerai pas aujourd’hui même. Ce que j’aurais de mieux à faire, mon pauvre bien-aimé, ce serait de te débarrasser de moi à tout jamais. Il n’y a pas de jour où je n’y pense, mais au moment de l’exécution la force me manque plus encore que la générosité. Cependant il faudra bien que cela finisse par là et alors pourquoi pas plus tôt que plus tard ? En attendant, mon pauvre adoré, et dans la plénitude de ma raison, je ne me reconnais pas le droit de t’imposer ma personne et mon amour. Quand je te dis le contraire, je suis folle, pardonne-moi.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16367, f. 257-258
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Jean-Marc Hovasse
[Souchon]

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne