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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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11 septembre [1845], jeudi soir, 11 h.

Je suis écrasée de fatigue, mon bien-aimé, mais cependant je ne me coucherai pas sans t’avoir dit bonsoir et sans m’être informée par la pensée de l’état de santé de ton frère [1]. Il faut que tu l’aies trouvé sérieusement malade puisque tu n’es pas revenu ce soir ? Peut-être aussi, et dans ce cas-là j’en serais bien contente pour lui et pour toi, que forcé de ramener Charlot à domicile, tu n’as pas pu revenir tout de suite m’embrasser, mais que je vais te voir tout à l’heure.
Cher bien-aimé, tu sais dans quel état tu m’as trouvée ce matin et dans quel état tu m’as laissée ? Je n’avais pas encore eu le temps de t’écrire. Depuis mes nettoyagesa m’ont conduite jusqu’à la nuit et au moment où j’allais t’écrire, la mère Lanvin est venue, qui a dînéb avec moi fort tard. Elle est repartie à 10 h. ½. Après elle, j’ai compté la dépense et puis enfin je finis par où je commence d’ordinaire ma journée en t’écrivant tout ce qui me passe par le cœur et par la tête. Je suis éreintée et courbaturée mais je ne pourraisc pas dormir si je ne t’avais pas dit toutes mes petites affaires de cœur. Mon Toto, je t’aime, tu es mon pauvre petit homme doux et ravissant que j’aime toujours de plus en plus comme si cela était possible. Seulement je ne te vois pas assez, voilà ce qui me tracasse. Aujourd’hui je n’ai pas trop le droit de me plaindre mais hier, mais avant-hier, mais, mais tous cesd mais-là sont bien chesses. Pourvu que ton frère ne soit pas sérieusement malade ? J’espère que non, et cependant tu n’es pas revenu encore ce soir. Je voudrais savoir au juste ce qui en est et j’attends ton retour avec bien de l’impatience. Dans le cas où tu aurais été obligé de rester à Versailles ce soir, tu reviendras demain matin, n’est-ce pas ? Je n’ose pas prévoir un cas assez grave pour te retenir au-delà de demain matin. J’aime mieux espérer et avoir confiance en Dieu. En attendant, je t’aime, mon Victor chéri, je te désire et je t’attends. Quand tu viendras, si le bon M. Abel n’est plus souffrant, je serai bien contente et bien heureuse et je me rabibocherai de toutes mes forces de tout mon bonheur perdu. D’ici là, je t’adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16360, f. 276-277
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « mes nétoyages ».
b) « a dîner ».
c) « je ne pourrai ».
d) « tout ces ».

Notes

[1Abel Hugo est souffrant.

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