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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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19 juin 1844

19 juin [1844], mercredi matin, 10 h.

Bonjour, mon petit Toto chéri, bonjour, mon cher bien-aimé adoré, bonjour, je t’aime. Comment vas-tu ce matin ? As-tu pris un peu de repos ? Es-tu moins triste et moins accablé qu’hier ? Quand viendras-tu déjeuner avec moi ? Quand me feras-tu sortir ? Quand te verrai-je ? Je te désire et je t’attends avec tout l’amour et toute l’impatience dont je suis capable, et ce n’est pas peu dire. J’ai de tristes nouvelles de cette pauvre Joséphine, je te raconterai cela en détail tantôt. En même temps, je te prierai d’apostiller une pétitiona adressée au Ministre de l’Intérieur pour la faire entrer aux Quinze-Vingt [1]. Pauvre créature, quelle suite d’affreuses tortures depuis qu’elle existe pour en arriver là ! Depuis ce matin, j’en ai le cœur serré. J’ai besoin de te voir, mon cher bien-aimé, pour reprendre de la confiance en Dieu car ces choses-là vous font douter de sa bonté. Dépêche-toi à venir, mon Victor bien aimé, et je serais bien heureuse. Je t’aime tant. Il n’y a pas de comparaison ni d’impression qui puisse te donner la mesure de mon amour ; je t’aime, je t’aime. Je voudrais tâcher de lire le livre en question [2], il faut pour cela que je me dépêche beaucoup. Suzanne n’est toujours pas très solide [3], et c’est aujourd’hui la blanchisseuse. Il faut me hâter dare-dareb.
Aime-moi, mon Victor adoré, pense à moi, viens bien vite et tu me rendrasc bien heureuse. Bien heureuse.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16355, f. 167-168
Transcription de Mylène Attisme assistée de Florence Naugrette

a) « petitition ».
b) « rendra ».
c) « dardar ».


19 juin [1844], mercredi soir, 5 h. ¼

J’ai bien envie de vous grogner, mon cher petit, et même de vous battre si je vous tenais, pour vous apprendre à ne pas venir plus que ça. Étonnez-vous, après cela, si je suis triste et si je me trouve malheureuse, je vous le conseille, Voime, voime. Le temps continue d’être hideux, et vous êtes comme le temps : c’est à qui de lui et de vous me donnera le plus mal à la tête, c’est très spirituel mais je vous déteste. J’ai bien envie de finir ce gribouillis sur cette impression et de vous prier d’y ajouter tout ce que vous voudrez car pour moi, je suis à bout de mon amabilité et de mon esprit. D’ailleurs, je souffre, j’ai mal à la tête et à l’estomac, et j’ai encore plus mal à mon cœur. J’ai plus envie de pleurer que de rire et je sens la méchanceté qui me galopea. Voilà, j’espère, plus de raison qu’il n’en faut pour s’abstenir et pour laisser la suite au prochain numéro ?
– – – – – – – – – – – – – b
Jour Toto, jour mon cher petit o, qu’est-ce donc qui t’arrive, mon amour, que tu ne viens pas ? Je suis triste et inquiète de ton absence, ce n’est pourtant pas la première fois, malheureusement, que tu oublies de venir, mais chaque fois que cela t’arrive, je suis tourmentée comme s’il ne pouvait y avoir qu’un accident sérieux qui pûtc t’empêcher de venir quand je t’attends. Tu penses qu’avec cette disposition d’esprit, je ne peux pas trouver grande ressource dans ma raison et dans ma patience ; aussi, je souffre et m’impatiente à cœur joie.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16355, f. 169-170
Transcription de Mylène Attisme assistée de Florence Naugrette

a) « galoppe ».
b) 13 tirets courent sur toute la ligne.
c) « put ».

Notes

[1Les Quinze-Vingt est un hospice pour aveugle créé par Saint-Louis.

[2À élucider.

[3La domestique Suzanne a été très malade.

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