Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1837 > Février > 27

27 février [1837], lundi, midi ½

Mon bon petit homme bien aimé et bien chéri, j’ai passé une meilleure nuit. Je désire de tout mon cœur que la tienne ait été aussi bonne. Voici Mme Lanvin qui vient de venir m’apporter 97 F. de la part de M. Pradier, avec promesse de complétera le reste au commencement du mois prochain. Je te conterai tout cela bien en détail, quand je te verrai. Il fait bien froid, bien vilain et bien noir, mais je voudrais vous tenir là auprès de moi, mon beau soleil rayonnant, et je croirais être en été.
Je me suis donné le plaisir de faire verser des torrents de larmes à cette pauvre Toinette en lui lisant ce que vous savez. Je suis très contente et elle aussi. Mon cher petit homme, vous m’avez promis monts et merveilles hier en me quittant. Vous devriez bien ne pas faire que promettre mais tenir un peu plus, je vous en serais très reconnaissante.
À propos de promesses, je vous rappelle celles de faire relier les fameux volumes destinés à Mme K [1]. Je t’assure que maintenant cela presse, car voici le troisième mois dans lequel nous entrons et il est plus que temps de donner les étrennes passées. Je te tourmenterai un peu maintenant parce que nous avons trop attendu.
Je t’aime toujours mon Toto chéri et même je t’aime plus. Si cela vous fâche je suis prête à vous en rendre raison à pied ou à cheval, debout ou couchée comme vous voudrez.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16329, f. 215-216
Transcription d’Érika Gomez assistée de Florence Naugrette

a) « complétter ».


27 février [1837], lundi 4 h. ¼

Mme Lanvin est repartie car elle a son mari très malade.
J’ai attendu le Manière jusqu’à présent mais il est probable qu’il ne viendra pas aujourd’hui. Pauvre cher bien-aimé, j’ai reçu ton billet de faire part, j’en ai baisé la suscription parce qu’elle était écrite de ta chère main adorée. Je voudrais bien te voir. Est-ce que vous n’allez pas bientôt venir ?
Je vais me mettre en train de repasser toutes les robes et toutes les chemises qui sont là en chiffons pour les resserrer dans mon armoire, mais je voudrais vous avoir vu auparavant pour avoir du cœur à l’ouvrage. Je suis triste comme un vieux bonnet de nuit, il me semble que je ne vous ai pas vu depuis l’année 1836. Venez donc très vite mon Toto.
Je vous écris sur un papier tout rempli [de  ?] gribouillages. Il y en a qui [illis.] des pâtés dont il font des nuages, j’en connais sous prétexte qu’ils sont très jeunes, j’en connais surtout un qui a cette manie de rajeunir d’un mois tous les jours. Au reste cela fait très bien dans le paysage et ne choque pas de tout la vue.
Quelle exécrable plume, je n’ai jamais rien vu de pareil, en fait de plume. Je ne peux pas écrire un seul mot sans le défigurer ou le percer de part en part. Cette plume est le vrai STYLET antique. Que le diable l’emporte après m’en être servie pour vous dire tant bien que mal que je vous aime, que vous êtes mon Toto bien aimé, que je vous adore et que je vous attends avec une grande quantité d’impatience et une plus grande d’amour.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16329, f. 217-218
Transcription d’Érika Gomez assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Laure Kraft (Laurence-Charlotte Kraft), musicienne, meilleure amie de Juliette.

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne