Jeudi, 3 h. après midi [1]
[30 avril ?]a
Mon cher bien-aimé, je m’apprête à aller jouir moi aussi de ton triomphe ! car le premier jour, vois-tu, j’étais plus morte que vive, et dans l’état d’irritation où j’étais, je ne suis pas bien sûre que les bravos et les acclamationsb de la foule ne me causaient pas une joie aussi douloureuse que l’auraient pu faire tous les sifflets réunis. Je veux aussi avoir mon tour de bonheur sans mélange. Je veux assister ce soir à ta représentation. J’espère que tu auras pu te procurer une loge du rez-de-chaussée car une loge du cintre deviendrait pour moi un supplicec d’un autre genre que le premier, mais qui m’empêcherait également de jouir de la pièce. Et puis, j’aurais bien du chagrin de cet incident car je le devrais à ton oubli.
Mon cher bien-aimé, mon amant, mon poète, [eh ?] bien, vous voilà.
Tenez, voilà tout.
Juju
BnF, Mss, NAF 16323, f. 233-234
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) Date rajoutée sur le manuscrit d’une main différente de celle de Juliette.
b) « acclamation ».
c) « suplice ».