Guernesey, 7 décembre [18]64, mercredi matin, 7 h. ¾
Bonjour ou bonsoir, on peut s’y tromper à la couleur du ciel. Bonjour de confiance, mon cher bien-aimé, comment as-tu passé la nuit et comment va ton rhume ce matin ? Je ne le saurai que tantôt, mais jusque là je veux croire que tu as bien dormi et que tu ne toussesa plus. Quel bonheur si tes deux fils viennent demain comme tu l’espères. Du caractère dont est Charles et avec l’affection qu’il a pour toi et pour sa mère, une fois réinstallé à Hauteville House, il n’y a plus de raison pour qu’il en sorte. Je vous souhaite à tous cette heureuse chance et je l’attends le cœur et les bras ouverts ainsi que son charmant frère. Ils feront bien de profiter de la tranquillité momentanée de la mer qui me paraît très bonaceb ce matin. Le moment d’ailleurs est venu de rentrer dans ses foyers surtout quand ils sont bien chauds et bien capitonnés comme sont les leurs. En attendant leur RENTRÉE je vous recommande de vous bien dorloterc dans votre petit coin, il y a un coin, et de m’aimer de tout votre grand cœur si vous voulez que je continue à emboîter le pas derrière vous jusqu’à la dernière étape de la vie comme nous en sommes convenus.
Je t’aime, mon cher adoré, je ne vis que par toi et pour toi, ta vie est ma vie et ton bonheur mon bonheur.
J.
BnF, Mss, NAF 16385, f. 258
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Florence Naugrette
a) « tu ne tousse ».
b) « bonasse ».
c) « dorlotter ».