Guernesey, 29 juillet 1860, dimanche, 7 h. ¼ du m[atin]
Bonjour, mon tout bien-aimé ; bonjour, mon pauvre cher petit souffrant ; bonjour. Comment vas-tu ce matin ? Je n’ai pas été assez heureuse pour happer ton regard au passage tout à l’heure quand tu as ouvert ta fenêtre mais j’espère que ton bobo va de mieux en mieux et que tu auras pu dormir toute la nuit. J’espère encore que tu en seras délivré tantôt car il me paraissait presque mûr hier, cet affreux bobo. Quel bonheur, mon pauvre adoré, si en te pansant ce soir je pouvais amener le bourbillon [1]. Dans tous les cas cela ne peut plus tarder beaucoup maintenant. Encore un peu de patience et tu en seras délivré pauvre cher bien-aimé, je te remercie de toute mon âme d’avoir eu la bonne pensée de revenir hier au soir chercher le trop plein de mon cœur que je ne peux jamais assez te donner. Sois béni pour cette marque de tendresse ineffable qui m’a rendue si heureuse et dont le souvenir me fait encore venir les larmes aux yeux d’attendrissement en ce moment même. Va tu as raison de m’aimer car je t’aime plus que tout au monde et plus qu’aucun mot, aucun chiffre, aucune comparaison ne peuvent l’exprimer. J’attends de tes chères nouvelles avec impatience, j’espère qu’elles seront aussi bonnes que je le désire. Jusque là, que tu vienne, je vais redoubler d’amour pour forcer le mal à s’en aller.
BnF, Mss, NAF 16381, f. 199
Transcription d’Amandine Chambard assistée de Florence Naugrette