Guernesey, 24 avril [18]70, dimanche matin, 6 h.
Bonjour, mon cher bien-aimé, bonjour et bonheur si tu as eu une bonne nuit pareille à la mienne. J’ai très bien dormi, ce qui ne m’empêche pas d’avoir un violent mal de tête en ce moment, ce que j’attribue au brouillard épais et chaud de ce matin. L’effet disparaîtra avec la cause dès que le temps s’éclaircira. Ce n’est qu’un peu de patience à avoir et qui m’est très facile en pensant à toi et en t’aimant de tout mon cœur. Je compte mettre à jour aujourd’hui le tas de journaux que j’ai sur ma table, quant aux livres je doute que jamais je trouve le temps d’y fourrer le bout de mon nez. On n’est pas parfait. D’ailleurs qu’est-ce que cela fait aux auteurs que je lise ou que je ne lise pas leurs chefs d’œuvres ? Ils s’en fichent autant et plus que moi-même. Donc je ne me fais aucun remords d’en prendre à mon aise avec ces divers formats de toutes couleurs et de tous poids. Pourvu que mon Rappel ne me manque pas et que tu m’aimes je suis contente et heureuse autant que je peux l’être en ce monde.
BnF, Mss, NAF 16391, f. 115
Transcription de Jean-Christophe Héricher assisté de Florence Naugrette