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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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21 décembre [1835], lundi matin, 9 h. ½

Bonjour, mon adoré, viens que je te baise sur tes pauvres yeux fatigués. Comment as-tu passé la nuit ? Comment va ton mal de gorge ? Tu auras eu bien froid cette nuit, n’est-ce pas, mon pauvre bien-aimé ? Il me tarde bien de faire cesser cet affreux travail de tous les jours. C’est à cause de cela que tu me vois souvent triste et préoccupéea. Pauvre ami, je t’aime tant, j’ai si peur que tu ne tombes malade à force de te fatiguer qu’il est bien naturel que je désire porter à mon tour le fardeau de mes besoins de chaque jour.
J’ai passé une assez mauvaise nuit, mais cela tient à des circonstances connues et pas du tout inquiétantes. J’étais réveillée d’assez bonne heure ce matin, mais j’ai été obligée d’attendre ma servante jusqu’à présent. Il paraît qu’elle s’apprête à m’impatienter par toutes sortes de gentillesses propres à ce genre d’animal. Au reste, je ne m’en émeusb que médiocrement, excepté ce matin où j’aurais voulu t’écrire plus tôt parce que dès que j’ai les yeux ouverts, c’est un besoin pressant pour moi de te donner avec le bonjour tout ce que j’ai de tendresse dans l’âme.
Mon cher petit homme chéri, viens de bonne heure si tu peux. Si tu ne le pouvais pas, je te promets d’être bien bonne et bien résignée. Je t’aime mon Victor. Je vous adore mon grand Toto.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16325, f. 244-245
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « préocupée ».
b) « je ne m’en émut ».


21 décembre [1835], lundi soir

Je viens de me [trolloper [1]  ?] à bête que veux-tu, pouah ! La vilaine cochonne, elle sent le haut-de-chausse du jurisconsulte aimable autant qu’éclairé à vous faire vomir tripesa et boyaux. Oh ! la vieille égueuléeb, elle m’a bien amusée et je lui pardonne son chicot pour la peine qu’elle a prise de le faire passer pour une dent.
ASSEZ VU LA CRAPAUDE.
Maintenant, parlons de nous. Je t’aime mon Victor adoré, je t’aime de toute la force de mon âme. Je t’admire et je te vénère de toute la force de mon intelligence. Tu es bien tout ce que j’avais souhaité sur la terre et espéré dans le ciel.
Mon cher petit homme, quand viendrez-vous ? Je suis très impatiente de vous voir. J’ai bien des bonnes choses à vous dire dans le tuyau de l’oreille.
Vous saurez que j’ai dîné très tard parce que j’ai envoyé chercher une douzaine d’huîtres ; et bien m’en a prisc car mon eau chaude était bonne tout au plus à prendre médecine, mais fort médiocre pour le dîner. J’ai compensé tout cela par un mélange admirable. Il n’y paraît plus à l’heure qu’il est et je me sens de force à soutenir tous vos assauts au physiqued et au moral.

J.

BnF, Mss, NAF 16325, f. 246-247
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « trippes ».
b) « la vielle égeulée ».
c) « m’en appris ».
d) « phisique ».

Notes

[1La lecture ne semble pas douteuse, mais le sens échappe.

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