Guernesey, 1er février [18]70, mardi, 2 h. après midi
Depuis que je t’ai vu, mon cher grand bien-aimé, je me sens tout à fait mieux. Ton sourire a achevé de me guérir. Je ne sais pas si c’est une illusion de mes yeux et de mon cœur, mais il me semble en ce moment sentir le souffle du printemps. Peut-être cela tient-il à l’approche de l’anniversaire de la première représentation de Lucrèce Borgia [1] qui sera fêtée et acclamée demain soir [2] comme elle l’a été il y a trente-sept ans par le public enthousiaste. Le Bonaparte aura beau faire demain [contre cette ?] admirable pièce, il en sera pour sa cabale policière. Mais je crois qu’il n’osera même pas se risquer dans cette infâme tentative. Je voudrais être à samedi pour en avoir le cœur net. En attendant je t’aime en princesse Négroni que je ne suis plus [illis.] que je suis toujours.
BnF, Mss, NAF 16391, f. 33
Transcription de Jean-Christophe Héricher assisté de Florence Naugrette