Paris, 4 mars [18]72, lundi matin, 9 h.
Bonjour, mon doux bien-aimé, j’espère que tu as passé une bonne nuit et les petits aussi. C’est là-dessus que je compte pour me remettre de mon insomnie carabinée d’horribles douleurs errantes et dont je souffre encore cruellement en ce moment. Heureusement que je suis faite à ces bobos-là ; autrement j’en pleurerais et j’en grincerais des dents. Mais la force de l’habitude fait que je m’en fiche. Autre guitare, je ne sais quel parti prendre pour le dîner ce soir ni sur quel pied faire danser mes marionnettes. À moins que tu n’aies reçu quelques instructions de Robelin à ce sujet et que tu veuilles bien me les envoyer par Suzanne tout à l’heure. En même temps je te ferais demander de la copie si tu en as de toute prête à me donner avec du papier ad hoc, il y a longtemps que je ne me suis servie de mon latin, je crains qu’il ne se rouille, c’est pour cela que je le dégaine ce matin et que je vous embrasse coram populo ex imo corde [1].
BnF, Mss, NAF 16393, f. 63
Transcription de Guy Rosa