19 décembre 1879

20 décembre 1879

Paris, 19 déc[embre] [18]79, vendredi midi

Cher bien-aimé, aurai-je le temps de finir ma restitus, je l’espère ; mais dans tous les cas je suis heureuse de pouvoir la commencer afin de laisser derrière moi la preuve que je t’adore. Il fait un froid de loup et un temps charmant, ce qui se concilie très bien souvent. Profitons de tous les deux aujourd’hui pour nous réchauffer l’un l’autre au plus près du cœur. Jusqu’à présent il n’est venu aucune lettre si ce n’est la convocation au Sénat et un billet de faire part de la famille Chaufour [1]. Comme tout le groupe^a de là-haut [2] dîne dehors j’ai cru bien faire en invitant les deux Simbozel et nos trois voisins à dîner avec nous deux ce soir.
Ai-je bien fait, not’ maîte ?
Oui, grosse bête ! [3]
Je t’adore.

[Adresse]
Monsieur Victor Hugo

BnF, Mss, NAF 16400, f. 308
Transcription d’Apolline Ponthieux assistée de Florence Naugrette

a) « grouppe ».

Notes

[1] Il s’agit peut-être d’un faire-part de décès pour Ignace Chauffour (1808-1879), juriste et homme politique, décédé le 6 décembre. Il est le frère du magistrat Louis Chauffour (1816-1888) et de Victor Chauffour (1819-1889), homme politique.

[2] Il s’agit de la famille Lockroy (Edouard Lockroy a épousé Alice Lehaene, veuve de Charles Hugo, en 1877) qui habite dans l’hôtel voisin de celui de Victor Hugo et Juliette Drouet, au 132, avenue d’Eylau.

[3] Juliette emprunte ces répliques « Ai-je bien fait, not’ maîte ? – Oui, grosse bête. » à une chanson populaire « Préchi, précha » : « Est-ce bien fait mon maître ? Oui, ma grosse bête ». Il existe différentes variantes de cette chanson. Mais elle écrit « not’ maîte », réplique de comédie imitant le parler paysan.