Paris, 21 nov[embre] [18]79, vendredi matin, 8 h.
In hastea [1], mon doux adoré, je vais te porter la nouvelle certaine, à date fixée, de l’arrivée de tout ton cher monde, petits et grands [2], mardi prochain, 25 ; la certitude de ce bonheur prochain est faite pour te donner de la patience jusque-là. En attendant, aimons-nous, aimons-nous, aimons-nous bien, corps, cœurs et âmes ; la main dans la main ; les yeux dans les yeux ; et aile dans l’aile !
Pendant que nous attendons la joie, le pauvre professeur Profilet de Massy [3] t’écrit une lettre navrée te disant qu’il est déjà définitivement révoqué avec une retraite de 600 F. pour toute compensation à son infortune imméritéeb. Roujon, qui doit dîner ce soir chez toi, lui a transmis ministériellement la triste nouvelle. Tu pourras peut-être savoir de lui, Roujon, quel est le vrai motif de cette rigueur qui ressemble à une vengeance personnelle. Quant à moi, je plains ce pauvre homme père de famille victime d’onc ne sait quelle lâche et anonyme vendetta. Plus que jamais je t’aime de tous les amours à la fois. Je te bénis !
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16400, f. 282
Transcription d’Apolline Ponthieux assistée de Florence Naugrette
a) « hast ».
b) « immérité ».
c) « dont ».