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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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27 mai 1837

27 mai [1837], samedi matin, 11 h. 

Mon cher petit bien-aimé. Tu m’as donné bien du bonheur hier au soir, et cela sans vanité et sans coquetterie. Mais je me voyais aimée de toi comme tu l’es de moi. Et en faisant la part de la poésie, je retrouvais dans mon cœur des souvenirs non moins vifs ni moins amoureux que les tiens. Merci mon cher adoré. Merci de me consacrer quelques vers de ta poésie [1]. Moi je te donne ma vie, mon âme à tout jamais. Et j’ai la douceur de penser qu’avec cela je suis aussi généreuse que toi. Quand on donne ce qu’on a, on donne autant qu’un roi (qui donne). En échange de vos admirables vers, je vous donne mon amour, sous toutes les formes et sous toutes les espèces. Je n’ai pas autre chose à vous donner. C’est mon esprit à moi. C’est ma poésie. Et vous savez que « les oiseaux dont les chants sont les plus doux et les plus harmonieux à l’oreille, sont de simples moineaux à l’œil. Tandis que le superbe oiseau du paradis est muet [2] ». JE SUIS L’OISEAU QUI CHANTE, MA VOIX C’EST MON AMOUR. Mon esprit c’est le moineau. Jour un petit o jour un gros to. Je vais être bien heureuse ce soir, surtout si tu viens me voir un peu dans la loge. Je ne crois pas que Mme Pierceau vienne. Je voudrais bien emmener quelqu’un à qui ça ferait un immense plaisir. Ce serait Mme Lanvin. Pour cela il faudrait que nous allassions la chercher. Je t’aime. Mon Toto je t’aime vous mon grand Poète.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16330, f. 227-228
Transcription de Sylviane Robardey-Eppstein


27 mai [1837], samedi, midi ¼

Mon cher petit bijou d’homme. Je me dépêche de vous donner votre contigent d’amour. PHAME L’ORTHOGRAPHEa [3] ! parce que je veux être prête si vous venez me chercher pour aller chez Mme Lanvin. J’aurais bien le désir de l’avoir pour lui parler un peu. J’ai besoin de parler quand je suis heureuse et il est plus que probable que Mme Pierceau ne viendra pas. Je vais y envoyer tout à l’heure. J’attends Jourdain aussi. Enfin je n’ai pas de temps à perdre si je veux être prête. Jour mon petit L’homme. Je vous aime mon petit o. Mais voici le beau temps qui montre le bout de son nez fort mal à propos. Nous [nous] en dispenserions bien à présent. Je viens d’avoir une catastrophe des plus huppées. La bonne en faisant son lit vient de casser mon joli plat de faïence que nous avions acheté ensemble. J’en suis doublement fâchée à cause cela. C’est un véritable chagrin pour moi quand un de nos souvenirs disparaît de la maison. Cependant j’en fais le sacrifice plus facilement dans l’espoir que cet ex-voto vous sera rendu en gloire et en succès ce soir [4]. Jour mon To. Jour mon gros to. Je finis ma lettre moins gaiement que je ne l’avais commencée. Jour on jour. Je t’aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16330, f. 229-230
Transcription de Sylviane Robardey-Eppstein

a) Ces deux mots écrits en gros occupent à eux seuls toute la ligne.

Notes

[1Il s’agit du poème « À Ol. », écrit le 26 mai 1837 et qui paraîtra dans Les Voix intérieures (XII). Hugo y évoque sa première rencontre avec Juliette. Les deux amants se disputeront à ce sujet (voir la lettre du 29 mai, 1 h. du matin).

[2Allusion à élucider.

[3Cet autocommentaire de Juliette laisse à penser que Victor Hugo lui avait fait remarquer la faute commise au mot « contingent » dans une précédente lettre (14 mai).

[4On reprend Angelo ce 27 mai 1837, sans succès.

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