3 novembre [1838], samedi soir, 6 h. ½
Mon cher petit bijou d’homme, vous êtes bien féroce pour moi. Non seulement vous ne restez pas une heure toute entière par jour avec moi, mais encore nous ne voulez pas me faire sortir de ma chambre sous aucun prétexte. Après cela, étonnez-vous si je suis malade et maussade ; j’ai continuellement mal à la tête, et depuis quelques jours, les crampes d’estomac s’en mêlent, aussi je suis très geaie, et très heureuse, comme il convient à une pauvre femme plus esclave qu’un chien, et moins aimée que ne le serait le dit animal en son lieu et place. Papa est bien i.
J’ai très mal reçu la lettre de Mme Guérard. Quand je pense que cette stupide créature ne manque de rien, qu’elle est riche même, et qu’elle a reçu en acompte depuis cinq ans plus de la moitié de la créance, sans parler de tout ce qu’elle a pris ou perdu de mes pauvres nippes, cela me met en colère, aussi je lui ai donné un refus très positif, avec un ajournement très lointain et très vague.
Je vous aime Toto. J’ai mal à la tête, horriblement, mais je vous aime à preuve que je vous désire de toute mon âme.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16336, f. 116-117
Transcription d’Élise Capéran assistée de Florence Naugrette