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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 18 janvier [18]73, samedi matin, 8 h. ¼

Cher grand bien-aimé, je ne t’ai pas aussi bien vu tout à l’heure que je l’aurais désiré, à cause du bonhomme de Putron qui passait devant ma fenêtre à ce moment là et dont je ne voulais pas être vue. Cependant je n’ai pas perdu un seul de tes mouvements ni une seconde du temps que tu as passé sur ton toit, ce contretemps n’a fait que me gêner, voilà tout. Bonjour mon cher bien-aimé, bonjour, comment as-tu passé la nuit, voilà ce qu’il m’importe de savoir et que je ne saurai pas avant de t’avoir vu, c’est-à-dire dans bien longtemps. Je prends patience en t’aimant d’arrache-cœur, ce qui est la meilleure manière de faire de nécessité vertu.
Je suis bien contente que tu aies reçu des nouvelles de tes enfants. Il était temps car sans te le dire je commençais à m’inquiéter de ton petit Victor. Maintenant tu sais par d’Alton et Lacretelle qu’il va bien sans être tout à fait guéri, ce qui explique pourquoi il ne t’a pas écrit depuis longtemps. Tu sais aussi que tes deux radieux petits enfants sont tout glorieux d’être en correspondance directe avec Papapa.
Tout cela fait un moment de joie dans ta vie si occupée et si austère et dont je prends ma part sans t’en demander la permission, mais je te demande pardon, mon pauvre adoré, de m’être laissée aller hier soir à une émotion rétrospectivement douloureuse en me rappelanta les souffrances de la petite enfance de Petite Jeanne. Ça [a] été plus fort que moi. Heureusement toutes ces angoisses là sont passées et il n’y a plus qu’à se réjouir et à se féliciter en la voyant si forte, si jolie, si intelligente et si heureuse et en tout pareille à son beau et bon petit frère. Le bonheur prochain, je l’espère autant que je le demande à Dieu, c’est qu’ils te soient rendus tous, les grands comme les petits enfants, d’ici à très peu de temps. Je les appelle à cœur, à corps et à crisb. Je t’adore.

BnF, Mss, NAF 16394, f. 17
Transcription de Maggy Lecomte assistée de Florence Naugrette

a) « rappellant ».
b) « à cor et à cri ».

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