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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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6 octobre [1846], mardi matin, 8 h. ½

Bonjour mon Toto, bonjour mon petit homme adoré, bonjour, je t’aime. Voilà un temps à manger tout vif et je donnerais tout MON ARGENT pour passer cette journée avec vous loin de Paris. Je ne le donnerais que pour cela mais je le donnerais avec enthousiasme et encore plus si j’en avais. Vous voyez que, quelque avare que je sois, j’entends encore très bien l’emploi de MON ARGENT. Il me semble que vous m’avez escamoté une Commission samedi dernier ? J’ai vu une lettre très pressante d’Altaroche qui vous demandait d’assister à cette séance et il est plus que probable que vous y serez allé. ET MOI ????????a
Tant pis pour vous d’abord si vous vous êtes permis de me frustrerb. Il faudra que vous me rendiez aujourd’hui même MA commission ou quelque chose d’équivalent comme par exemple une promenade aux Jardins des Plantes où nous verrons des OURS qui, pour n’être pas nés au SEIN de la Commission, n’en sont pas moins de vrais ours. Si vous aimez mieux vous dépayser ailleurs, j’y consens encore. Je ne tiens pas tellement aux synonymesc que je n’accepte pas autre chose. Pourvu que je sois avec vous, peu m’importe puisque vous êtes plus Ours que tous les ours réunis, plus AUTEUR que tous les auteurs de toutes les ménageries, pardon je voulais écrire Académies passés, présents et futurs. S’il faut vous PAYER votre journée, je vous la paierai, voilà tout. Mais que je profite avec vous aujourd’hui de ce dernier beau jour. En attendant, je vous aime comme un chien fidèle et [caniche ?].

Juliette

BnF, Mss, NAF 16364, f. 187-188
Transcription de Gwenaëlle Sifferlen assistée de Florence Naugrette

a) Les huit points d’interrogation courent jusqu’au bout de la ligne.
b) « frustée ».
c) « synonimes ».


6 octobre [1846], mardi soir, 5 h. ½

La nuit vient, mon Toto, et vous ne venez pas quoi que je vous attende depuis le matin. Qu’est-ce qui vous est donc arrivé, mon cher petit homme adoré, pour que vous m’oubliieza à ce point ? Rien de fâcheux j’espère ; en attendant, j’en suis réduite aux suppositions les plus humiliantes et les plus tristes les unes que les autres. Tâchez de ne pas me laisser plus longtemps dans cet état ridicule et douloureux.
J’ai eu ce matin la visite de Mme Guérard et tantôt celle de M. Démousseaub et de son fils. Cela ne m’a pas empêchée de lire tous vos journaux [1] sans en excepter un seul. Ce soir j’ai les deux petites Rivière qui sont venues m’arranger différentes petites choses obligeamment, mais tout cela ne m’intéresse pas quand je vous attends. Rien au monde ne peut me faire prendre le change sur votre absence. Aussi je m’inquiète et je m’ennuie à cœur que veux-tu depuis tantôt. J’ai beau me donner toutes les raisons possibles pour expliquer ton absence, il y en a une plus forte que toutes, c’est que j’ai besoin de te voir. Plus je vais et plus ce besoin sec fait impérieux. Je t’aime trop, mon Victor, je voudrais me modérer mais je ne le peux pas. Plus je vais et plus je t’aime. Hélas et par contre coup, plus tu es occupé et moins tu viens. Je ne t’en veux pas, je ne t’accuse pas. Je suis triste et je t’aime, voilà tout.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16364, f. 189-190
Transcription de Gwenaëlle Sifferlen assistée de Florence Naugrette

a) « oubliez ».
b) « Démousseaux ».
c) « ce ».

Notes

[1Juliette Drouet n’est autorisée à lire que les journaux que Victor Hugo lui apporte. Cela fait partie de leur « pacte ».

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