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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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28 avril [1838], samedi matin, 10 h. ½

Bonjour petit gascon, bonjour petit Toto bien-aimé. Bonjour mon petit ours blanc. Il paraît que votre baromètre est bien au-dessous de zéro, température du Spitzberg ? merci ! Ah ! que j’aimerais mieux vous brûler ! Il paraît que ce n’est pas chose facile : ce n’est pas que je souffle le feu tant que je peux, ce n’est pas ma faute s’il ne prend pas. Jour mon petit o. C’est aujourd’hui le grand jour que les tapissiers viennent ; nous allons voir si votre invention fait aussi bien que vous le dites. Je suis disposée à la critiquer sans pitié : tiensa ! vous ne m’avez pas payée pour être contente, ainsi je peux bien vous tomber sur la carcasse de votre cheminée. Je suis très grinchoue aujourd’hui, ainsi prenez garde à vous. Vous savez que vous avez l’intention d’acheter aujourd’hui vos brosses et vos peignes. Je vous conseille de n’y pas manquer si vous ne voulez pas que l’argent se dépense à autre chose. Jour mon petit o, jour mon To, jour mon gros To. Je vous adore, je vous attends et puis toujours ainsi comme un écureuil dans sa cage. C’est pas beaucoup amusant mais c’est très monotone. Je baise votre très belle bouche et vos trente-deux dents.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16334, f. 88-89
Transcription de Mathieu Chadebec assisté de Gérard Pouchain

a) « tient ».


28 avril [1838], samedi soir, 6 h. ¼

Mon cher adoré, j’avais le cœur triste en te quittant. J’avais eu à peine le temps de voir ta ravissante petite personne qu’il m’a fallu la quitter avec la perspective de ne plus la voir qu’après minuit ; aussi si j’avais eu l’espoir qu’en te priant bien tu serais resté un quart d’heure de plus avec moi, je me serais mise à genoux dans le milieu de la rue. Malheureusement mes prières n’ont plus aucun pouvoir sur toi, c’est ce qui fait que je n’ai pas tenté la chose. Tu ne sais pas combien je t’aime, mon adoré, non, tu ne le sais pas puisque tu peux rester des siècles loin de moi et volontairement. Mon Dieu, mon Toto, comme vous étiez beau en me parlant dans l’omnibus. J’étais jalouse en pensant que vous aviez cette jolie petite frimousse-là en parlant à ces mufles de la commission historique [1] bourrique et autres. Je vous défends une autre fois d’être beau pour d’autresa que moi. Venez ici que je vous baise tout de suite, ouvrez votre gueuleb bien au fond, tout au fond, et ne vous en allez pas à la fin. Je me fâcherai tout rouge et Dieu sait ce qui arrivera. Je t’aime toi.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16334, f. 90-91
Transcription de Mathieu Chadebec assisté de Gérard Pouchain

a) « d’autre ».
b) « geule ».

Notes

[1Le 25 avril, Hugo est intervenu au Comité des Arts et monuments, sur les architectes (le 18, il y était déjà intervenu, sur le vandalisme).

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