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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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4 septembre [1842], dimanche après-midi, 4 h. ¾

Mon cher bien-aimé, vous êtes à Saint-Prix [1]. Je le sens à la tristesse que j’éprouve ou, si vous n’y êtes pas encore, vous y serez ce soir, ce qui sera à peu près la même chose pour moi. Mon pauvre ange GARDIEN à moi, je te remercie malgré ma tristesse présente de la bonne nuit et de la bonne petite matinée que tu m’as donnée et sur lesquelles je ne comptais pas car je croyais que tu resterais jusqu’à ce soir à la campagne. Tu m’as surprise bien agréablement en venant un jour plus tôta que je n’osais l’espérer. Sois béni, mon adoré, mon Toto bien aimé. Que ton petit garçon revienne bien vite à la santé [2], que toute ta ravissante petite famille continue à être la plus heureuse et la mieux partagée de toutes les autres, que ta goutte ne reparaisse jamais, même en songe, que tu m’aimes un peu et que tu te laisses aimer par moi de toutes mes forces et de toute mon âme. Voilà, les vœux que faitb ta pauvre Juju en pensant à toi. Si tu es à Saint-Prix, comme ce n’est hélas ! que trop probable, embrasse pour moi tous les chers petits goistapioux, y compris les deux pigeons, l’ânesse et l’ânon hargneux et rapporte-moi une fleur du jardin de QUASIMODO, comme cela je saurai que tu as un peu pensé à moi et cela me fera du bien à mon pauvre cœur.
Que je te voie donner ton avis sur la blancheur plus ou moins équivoque de mon bonnet et sur la propreté hasardée de la SERVARDE, vilain COCHON, vilain salopc, je t’en ficherai des coups de balai sur ton dos pour t’apprendre à fourrer ton groin où tu n’en as pas à faire. Viens-y POLISSON. Je vous ferai des dessins quand vous m’en ferez dent pour dent, œil pour œil, dit L’ÉCRITURE [3]. Eh ! bien, moi aussi je dis pif pour pif, GEULE pour geule, chef d’œuvre pour chef d’œuvre DONNANT donnant ou rien du tout, voilà mon ULTIMATUM. En voilà du latin académicien. Mets ça dans ta poche, ça n’est pas du lard et baise-moi tout de suite.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16350, f. 113-114
Transcription de Laurie Mézeret assistée de Florence Naugrette

a) « plutôt ».
b) « fais ».
c) « salot ».

Notes

[1Les enfants de Victor Hugo, ainsi que sa femme, sont partis entre le 24 et le 25 août s’installer pour quelques mois à Saint-Prix dans le Val d’Oise. Victor Hugo va donc régulièrement les y rejoindre.

[2François-Victor Hugo, se remet d’une grave maladie pulmonaire.

[3« L’écriture » désigne la Bble. Juliette cite la loi du talion (œil pour œil, dent pour dent).

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