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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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31 [juillet 1839], mercredi matin, 9 h. ¾

Bonjour mon cher petit adoré, bonjour mon petit homme. Je suis levée depuis 8 h., mais j’ai voulu arranger Claire dans le cas où on la viendrait chercher de bonne heure ; et d’une chose à l’autre, je t’écris plus tard que je ne voudrais. Mais je vais rentrer à partir de demain dans mes bonnes habitudes, qui sont de te consacrer la première pensée et la première action de ma journée. J’ai bien fait de ne pas sortir hier, ça t’a forcé à te reposer un peu et vraiment tu en avais besoin, car tu étais épuisé de fatigue et de chaleur. Bonjour ma joie. Bonjour ma vie. Bonjour mon Toto adoré. Je t’aime. Tu devrais bien tâcher de me donner un petit bout de ta soirée pour souper avec moi. Tu sais que tu m’avais promis à l’occasion de ta fête de me mener dîner aux Marronniersa [1] ? Mais comme je sens que dans ce moment-ci c’est impossible, je borne mes prétentions à un petit souper à L’HEURE que tu VOUDRAS, pourvu que je t’aie, ça m’est égal. Le plus tôtb c’est toujours le meilleur, mais vaut mieux TRÈS TARD que jamais. Tâche d’arranger cela pour très tôt et tu combleras de joie ta Juju qui t’adore.

BnF, Mss, NAF 16339, f. 177-178
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Jean-Marc Hovasse

a) « maronniers ».
b) « plutôt ».


31 juillet [1839], mercredi soir, 5 h ½

J’ai été contrariée toute la journée, mon Toto, et tout cela à cause de Claire. Au reste, Lanvin n’est venu la chercher qu’à quatre heures et demie, et pendant ce temps-là la bonne de la pension, qui est accablée de besogne aujourd’hui, venait savoir pourquoi Claire ne venait pas. Enfin cette pauvre fille a eu tous les guignons possiblesa aujourd’hui. J’espère cependant qu’ils s’arrêteront sur le seuil de sa porte. À propos, j’ai vendu mes vieux bric-à-bracb, puants et embarrassants, 10 francs. Juste le prix que m’a coûté le parapluie. Le premier marchand m’en avait offert 3 francs. Je l’ai renvoyé avec indignation. Bref, le second, après bien des débats, m’en a donnéc 10 francs et je les lui ai laissés. Maintenant si j’étais sûre de passer la soirée avec vous ou bien encore de déjeuner côte à côte avec vous dans mon DODO, je serais la plus heureuse des femmes, mon Toto. Mais hélas ! Sans petits pois aucun puisque vous trouvez que cela gâte le style [2], je n’ai pas le plus petit espoir, aussi si vous me donnez l’une ou l’autre de ces deux choses, votre soirée ou votre matinée, vous auriez tous les honneurs et tous les bénéfices d’une surprise agréable et inattendued.
Je vous aime mon Toto. Baisez-moi, aimez-moi et ne m’oubliez pas trop longtemps.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16339, f. 179-180
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Jean-Marc Hovasse

a) « possible ».
b) « brics à brac ».
c) « donner ».
d) « innatendue ».

Notes

[1Les Marronniers est un restaurant réputé de Bercy.

[2Juliette a dessiné sept petits points sous le mot « pois ».

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